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DANIEL MYRICK & EDUARDO SANCHEZ - LE PROJET BLAIR WITCH (1999)

Avec trois bouts de ficelle ...
Des bouts de ficelle qui relient des petites branches pour former des signes inquiétants. C’est à peu près le seul truc qui ne soit pas naturel dans le film…
« Le projet Blair Witch », où comment deux même pas trentenaires américains, Daniel Myrick et Eduardo Sanchez, engendrèrent un des plus colossaux ratios lucratifs (recettes du film par rapport à son coût) de tous les temps. Cinquante mille dollars investis et des centaines de millions de recettes. Tout ça pour un film qui n’en est pas un. Et par deux types inconnus qui ne feront, soit ensemble, soit séparément, plus rien de notable.
Daniel Myrick & Eduardo Sanchez
« Le projet Blair Witch », c’est fait avec les moyens d’un documentaire fauché, genre reportage animalier à la télé est-allemande dans les années 80. Et encore, les boches rouges avaient beaucoup plus de brouzouf… Ici, on a en tout et pour tout une mini-caméra vidéo portable et une en super 16. Les deux tenues à l’épaule, c’est filmé en marchant ou en courant, et souvent la nuit, donc il y a des scènes où on ne voit que le noir intégral. Un truc totalement insensé, à l’encontre de ce que l’on peut voir dans les salles.
Le scénario tient sur un timbre-poste. Trois ados filment un docu dans une forêt où auraient eu lieu à différentes époques des crimes abominables et inexpliqués, que la légende locale attribue à la sorcière de Blair (à moins qu’il y ait plusieurs créatures, on sait pas trop). Les trois bambins se paument dans les bois et vont y passer quasiment une semaine. Un disparaîtra sans laisser de traces (mais des cris de souffrance, on y reviendra), les deux autres termineront leur périple dans une maison délabrée et peu avenante. Toujours en filmant leurs faits et gestes, y compris les plus anodins. En intro, on nous précise que ce sont les images qu’ils ont tournées que l’on retrouvera un an plus tard et qui donneront le film.
Promenons-nous dans les bois ...
« Le projet Blair Witch » inaugurera à peu près (même si certains exégètes citent des œuvres inconnues par des types qui le sont tout autant, comme influences potentielles), un genre particulier de film d’épouvante, celui filmé par les gens qui le vivent (voir la série des « REC »). Avec une technique calamiteuse (les trois savent tout juste tenir une caméra), un peu à la « Massacre à la tronçonneuse », et aucun effet spécial à l’horizon. Tout repose sur une longue montée oppressante de la tension. Sans rien montrer, pas la moindre goutte de sang (on voit tout juste fugitivement enveloppé dans un chiffon au milieu d’un fagot de branches, un truc sanguinolent qui ressemble à une dent), et pas la moindre créature infernale qui dézingue tout ce qui est à l’image (ce qui rend par exemple ridicule le final du quasi clone de « Blair Witch » sorti dix ans plus tard, « Paranormal activity »). Je sais plus qui c’est qui avait dit (Polanski, à propos du bébé maléfique de « Rosemary’s baby » que plein de spectateurs ont décrit alors qu’il n’apparaît jamais à l’image ?) que la peur tu l’as en toi, et que le reste n’est que projection intérieure de fantasmes…
Putain mais c'est quoi ces trucs ?
« Le projet Blair Witch » est une merveille de réussite anxiogène, depuis les ploucs de chez plouc qui interviennent sous forme de micro-trottoir au début pour raconter la ou les légendes de leur bled perdu du Maryland, jusqu’à cette tension qui monte inexorablement au cours des nuits en forêt. Coup de génie, les journées (qui constituent l’essentiel des images), il ne se passe rien (sinon on verrait, et le film perdrait tout son intérêt). Juste de temps à autre la découverte par les randonneurs paumés de quelques tas bizarres de cailloux ou de guirlandes cabalistiques étranges pendues aux arbres. Les jours servent juste à faire monter la pression chez le spectateur comme chez les trois, qui alternent nonchalance potache et pétages de plombs quand ils se rendent compte qu’ils sont complètement paumés, avant à la longue de flipper leur race.
« Le projet Blair Witch » n’a pas de fin (dans le sens d’une fin de film qui donne un épilogue à l’histoire). Au milieu de la panique galopante qui saisit le garçon et la fille « rescapés » dans la vielle baraque en ruines, on les imagine étripés (par quoi ou qui ?), alors que très fugacement, on en aperçoit un collé à un mur et la fille semble se cogner avant de tomber et de laisser sa caméra filmer un plafond décrépi. Tout ça parce cette histoire de sorcière(s) est omniprésente et qu’un des garçons a disparu une nuit sans laisser de traces. Seuls des gémissements au début sourds et la dernière nuit se transformant en hurlements, que les autres reconnaissent comme étant siens, indiquent sa « présence » et guident les deux autres vers l’épouvantable ( ? ) final nocturne.
Image devenue culte ...
Ce qui prouve qu’il y a des choses travaillées, notamment la bande son qui est fabuleuse, ultra flippante avec ses bruissements, ses bruits de pas ou de cavalcade, ses plaintes étouffées ou ses cris de souffrance, quand l’écran est noir. Ou les discussions échangées par les trois ados, leur farouche volonté malgré tout de s’en sortir qui laisserait présager une plus ou moins happy end (la dernière scène a été tournée de plusieurs façons, sans que l’on sache ce qu’étaient celles qui n’ont pas été retenues), et le leitmotiv qui voudrait que l’on ne disparaisse pas dans les Etas-Unis des années 90, que l’on finit toujours par vous retrouver, et qui revient plusieurs fois dans les dialogues façon méthode Coué.
Tout le casting est composé d’acteurs amateurs, et c’est pour les trois personnages principaux leur premier film (d’ailleurs aucun des trois ne fera beaucoup parler de lui par la suite). Ils ont été lâchés pendant deux semaines dans les bois avec leur barda, passant leurs journées à crapahuter et à se filmer, n’ayant aucune idée du scénario (les réalisateurs leur donnaient les instructions le matin pour la journée, tout a été tourné chronologiquement).
Le succès du film sera colossal, appuyé par un marketing (sans aucun moyen, mais avec beaucoup d’imagination au départ) qui fera par la suite école et que l’on a l’habitude de qualifier de « viral ». Les réalisateurs notamment ont profité de l’internet naissant pour multiplier les sites (tous des fakes) où l’on trouvait la « vraie » histoire à l’origine du film, et les prétendues calamités arrivées aux participants (l’un des deux réalisateurs était même soi-disant mort, victime de la terrible vengeance des forces maléfiques). Et même encore aujourd’hui, on trouve sur des forums de pauvres gogos angoissés par cette histoire qu’ils croient vraie.
Ne reculant devant rien, certaines jaquettes de Dvd assurent qu’« on a pas eu autant les jetons au cinéma depuis « Shining » ». Bon, faut pas pousser, faudrait voir à rester dans le domaine des choses comparables.
Il n’empêche que « Le projet Blair Witch » est quand même une belle réussite et qu’il sera difficile de faire aussi anxiogène avec aussi peu de fric.
Une leçon à méditer pour tous ceux qui claquent des millions de dollars dans des effets gore piteux …



DELBERT MANN - MARTY (1955)

La beauté cachée des laids, des laids, ...
… se voit sans délai, délai, dixit Gainsbourg. Qui n’avait pas exactement un physique de playboy, mais s’est révélé excellent séducteur. Les deux personnages principaux de « Marty », le film de Delbert Mann, sont plutôt moches et n’ont rien de séduisant. Bourrés de complexes, de gaucherie, s’entêtant à mettre des bâtons dans les roues de leur chétive amourette …
Delbert Mann (chemise blanche), l'équipe technique, Blair & Borgnine
Le résultat est pourtant superbe. Pas vraiment à cause de la romance à deux balles qui est au cœur du film, mais surtout grâce au contexte de cette histoire (le quartier italien de New York dans les années 50), et plus encore grâce aux acteurs. Betsy Blair (pas si moche que ça, en fait, mais pas non plus une bombe sexuelle sortie des studios américains, certes …), parfaite en  prof fille à papa, trop timide et coincée pour oser prendre sa vie en mains. Et surtout l’inattendu (dans ce rôle-là) Ernest Borgnine, garçon boucher au cœur d’or, empêtré dans les traditions du petit peuple rital et embrouillé par ses potes niais et grandes gueules.
Ouais, Borgnine. Trapu et court sur pattes, regard bovin de petite frappe. Jusque là remarqué pour des seconds rôles de méchant, de salaud, dans des grands films comme « Et tant qu’il y aura des hommes » (au passage, c’est Burt Lancaster, qui co-produit le film et présente la bande-annonce américaine de « Marty »), « Johnny Guitare », « Vera Cruz », « Un homme est passé ». Dans « Marty », il est à total contre-emploi (mais y gagnera la statuette de meilleur acteur). Il est Marty Piletti, apprenti boucher, vivant la trentaine bien sonnée chez sa vieille mère quand tous ses frères et sœurs cadets sont mariés. Affable, travailleur, complexé par son physique, traînant sa timidité et son mal de vivre dans les bistrots et les « dancings » le samedi soir … Pote avec d’autres traine-savates à l’existence aussi morne que la sienne, mais dont il redoute le regard et les quolibets quand il démarre son idylle avec Clara (Betsy Blair).
Marty & Clara
Qu’il a osé aller consoler alors que sous prétexte de mocheté, elle venait de se faire abandonner dans un dancing par un bellâtre coureur.
« Marty », du peu connu Delbert Mann (bien que ce film, phénomène assez rare dans les annales cinématographiques, lui ait valu la même année Palme d’Or et Oscar), est un film court (moins d’une heure et demie), au rythme nonchalant et indolent, comme ses personnages principaux. Il est pourtant d’une grande richesse, grâce à une merveille de scénario qui nous immerge dasn la communauté (voire le communautarisme) italien de New York, et une galerie de personnages secondaires fouillée, faisant ressortir des caractères mémorables, comme la mère de Marty (excellente Esther Minciotti), la tante fouteuse de merde, le couple à problèmes et disputes de son cousin comptable, le pote bien relou Angie, …
Il n’y a pas d’action (au sens Chuck Norris du terme) dans « Marty ». Pas non plus une galerie de portraits plombante comme un casting de Dreyer (grand réalisateur qui a fait de grands films, mais qui te foutent le moral dans les chaussettes encore plus sûrement qu’un discours de Fillon sur les soins palliatifs en fin de vie). « Marty » est un film vivant, qui trouve le rythme parfait entre les personnages et leur histoire (le temps que va passer Marty à essayer de rouler une pelle à sa chérie, qui évidemment va au dernier moment détourner la tête et le regard…). « Marty » est un film qui rend crédibles et réalistes des personnages et des situations sur lesquels on a quelque peu forcé les traits (les merveilleuses scènes entre la mère et la tante de Marty, entre Marty et Angie).
Marty & Angie
Aujourd’hui, « Marty » est un film quelque peu oublié (on ne le trouve par ici que dans une version DVD assez bâclée sans bonus), certainement plus à cause de la carrière en demi-teinte qu’ont effectué Mann, Borgnine et plus encore Blair, que de ses qualités intrinsèques.

Plus qu’un vague mélo 50’s, « Marty » est une belle tranche de vie sur une génération et une époque prétendues « dorées », mais où derrière le vernis de l’insouciance, se trouvaient déjà les fêlures et le mal-vivre de ceux qui n’entraient pas dans le moule idéal du « rêve américain » …


JEAN-LUC GODARD - LE MEPRIS (1963)

A Capri, c'est fini ...
« Le Mépris », c’est le film le plus abordable de Godard. Peut-être bien aussi son meilleur. Et ça, Godard le sait. Et depuis longtemps. Conclusion, pour ceux qui en douteraient : Godard filme ce qu’il veut, se fout du succès et vous emmerde.
Piccoli, Bardot & Godard
« Le Mépris », c’est une figure imposée, et un exercice de style. La figure imposée, c’est que son fidèle financeur (dans le cinéma on dit producteur) Georges de Beauregard commence à en avoir ras le chéquier de « sponsoriser » Godard dont les films, pour faire simple, ne remplissent pas vraiment les salles, et ne veut plus foncer tout seul, surtout que Godard rêve de faire travailler Bardot, superstar du cinéma européen et donc aux cachets conséquents. Une approche est tentée vers le magnat italien Carlo Ponti. Qui veut bien mettre des pépettes mais n’entend pas laisser carte blanche à Godard qu’il considère ingérable. Qu’à cela ne tienne, le Suisse lui met sous le pif un best-seller d’Alberto Moravia, « Le Mépris », qu’il compte adapter. Marché conclu. Des investisseurs américains complètent le tour de table. Et auront ô combien leur importance dans l’histoire du film. Ce sont eux, qui après avoir vu les premiers montages piquent une gigantesque colère. What ? Ils ont sorti les dollars pour avoir Bardot et elle se fout même pas à poil ? Ils imposent à Godard des « scènes de nu » selon le vocabulaire pudibond de l’époque. Résultat : la première « vraie » scène du film, celle d’anthologie avec Bardot nue sur un lit qui demande (entre autres appréciations anatomiques) de son inégalable voix d’ingénue à Piccoli : « Tu les trouves jolies mes fesses ? » … Un grand merci aux producteurs américains, parce que le cul à Bardot, ben je vais vous dire ma bonne dame, c’est quand même quelque chose …
Mais résumer « Le Mépris » au popotin de BB, c’est quand même plutôt réducteur. Parce que le film, c’est avant tout du Godard. Mais accidentellement. Je m’explique. Godard, il en avait rien à cirer du bouquin de Moravia, même s’il a écrit un script (avant le tournage, chose assez rare chez lui), il est assez éloigné, voire très éloigné du livre. Godard veut faire un film classique. A tiroirs, comme d’habitude, mais un film classique par la forme. Il a la tête d’affiche absolue de l’époque (Bardot), filme (enfin, c’est plutôt comme d’habitude le fidèle Raoul Coutard qui est derrière la caméra) en couleurs, en extérieurs et en scope. C’est-à-dire assez loin de ses noirs et blancs baveux caméra sur l’épaule qui ont fait sinon sa fortune, du moins sa réputation. Et Godard va soigner ses plans, ses prises de vue dans le féérique décor de Capri. Sauf qu’un beau jour, après environ trois semaines de tournage, les comptables lui font remarquer qu’il a bouffé les trois-quarts du budget, et qu’il n’a même pas mis une demi-heure de film en boîte. Résultat : un quasi plan-séquence (intercalé au milieu du film) de trente quatre minutes dans un appartement inachevé pendant lequel Piccoli et Bardot, se disputent, se réconcilient, se baladent à poil, se disputent, prennent un bain, se disputent, s’envoient des baffes, se disputent … et ne se réconcilieront plus. Une enfilade de dialogues quasi-improvisés qui font, évidemment, qu’on ne comprend plus grand-chose à ce qui a précédé et qu’on ne comprend plus rien à ce qui va suivre. Du Godard, quoi, comme je vous disais quelque part plus haut …
Lang, Piccoli, l'Alfa Roméo, Palance, Bardot
« Le Mépris », c’est l’art des poupées gigognes mis en images. Le mariage du couple Javal prend soudainement l’eau. Paul Javal (Piccoli dans un de ses meilleurs rôles, sinon le meilleur) est scénariste, sa femme Camille (Bardot) dactylo, mais ça n’a aucune espèce d’importance dans le film. Le producteur américain Prokosh (Jack Palance) propose à Paul de refaire le scénario d’une adaptation de « L’Odyssée » que tourne Fritz Lang, qui joue son propre rôle. Evidemment, la relation qui devient tumultueuse entre Paul et Camille s’imbrique dans le tournage et les à-côtés du tournage  du film de Lang, et offre des bifurcations sur la création, l’art, et les rapports qu’ils entretiennent avec l’argent. Mais comme toujours chez Godard, rien n’est franchement dit ou montré, tout est sous-entendu, elliptique. Rien que le choix de Lang pour jouer son propre rôle (Godard apparaît vers la fin, il joue le rôle de son assistant, décryptez ce que vous voulez, bon courage …) relève plus du mystique que du rationnel. Il y a d’ailleurs dans les bonus du BluRay un documentaire d’une heure (« Le dinosaure et le bébé », en voilà du titre de doc !) retranscrivant une discussion en 1967 (assez passionnante il faut dire) entre les deux hommes, plus une interview d’une demi-heure de Lang pendant le tournage du « Mépris ». Autant dire que pour Godard, le personnage clé du film, c’est pas Bardot (d’ailleurs Godard et Bardot s’engueuleront souvent sur le tournage), c’est pas le couple qu’elle forme avec Piccoli, c’est bel et bien le vétéran allemand. Avant toute autre chose, « Le Mépris » est un film sur le cinéma, ou plutôt sur la vision qu’a Godard du cinéma.
Film dans le film : Lang (sous le parasol) & Godard (sous le chapeau)
Il est d’ailleurs amusant de constater que tous les spécialistes ès-Godard patentés et les protagonistes du film (sauf Bardot, mais à l’ère du BluRay, vaut mieux éviter de faire causer la Brigitte, eu égard à toutes les conneries qu’elle pourrait raconter), bien des années plus tard (et y compris Godard), sont incapables de dire pourquoi, au vu du film, Camille méprise Paul, et quel est in fine le message du film.
Ce qui n’est pas bien grave, car « Le Mépris » est un film pour les yeux avant d’être un film pour l’esprit. Un film qui commence par le générique (mais un générique particulier, puisque en montrant à l’image le tournage d’une scène à Cinecitta, c’est Godard lui-même qui de sa si particulière voix nonchalante, lit en off ledit générique), nous donne l’occasion de prises de vue superbes à Capri et dans le bunker futuriste de la villa Malaparte où se consommera la rupture définitive entre Paul et Camille. Un film où l’on s’aperçoit aussi que même avec une perruque de brune, Bardot crève l’écran (alors qu’elle joue « naturellement », c’est-à-dire comme une savate). Que les acteurs américains y vont à fond (Palance manque réellement de décapiter une actrice en jetant en proie à une colère noire une bobine à travers une salle de projection). Que Godard ne peut s’empêcher de caser ses jeux de mots idiots à base de prénoms (après « On fonce Alphonse » de « A bout  de souffle » et avant le « Allons-y Alonzo » de « Pierrot le Fou », on a droit ici à « Tu me prends dans ton Alfa, Roméo ? »). Que la peinture bleue commence à faire son apparition (les yeux des statues grecques, avant le face-painting de « Pierrot le Fou »)… Et que la qualité du BluRay est tout juste passable … Et que Bardot a un joli cul, mais je crois l’avoir déjà dit …
La villa Malaparte à Capri
A noter aussi, et ça n’arrivera pas souvent dans l’œuvre de Godard (parce que lui et la musique semblent définitivement fâchés malgré tout le mal qu’il se donne pour s’y intéresser), que « Le Mépris » est aussi un film pour les oreilles. La B.O. est une de celles qui font date, portée par un thème lancinant de Georges Delerue, qui vient toujours rythmer de façon judicieuse (et ce malgré son côté répétitif) mais jamais agaçant les scènes ou même les plans-clés du film. Et puis il y a la reprise d’un des rares titres de rock’n’roll italien, le « 24 000 baci » de Celentano, par une chanteuse yéyé-neuneu pendant l’entracte dans une salle de cinéma.
Bon, allez, pour finir, une anecdote. Godard voulait que dans la longue scène dans l’appartement en construction, Bardot mette une perruque brune. Refus catégorique de la star. Pari de Godard, qui déjà avait l’air de perpétuellement se réveiller et fumait des cigares gros comme des troncs d’arbre : « Si je parcours quinze mètres en marchant sur les mains, tu mets la perruque ? ». La super-nunuche accepte. Et bien Godard, qu’on a du mal à imaginer en artiste de cirque équilibriste, l’a fait, preuve à l’appui dans le doc filmé en 1967…

Mais oui, B.B., on les trouve très jolies, tes fesses … Et le reste du film aussi …

Du même sur ce blog :

TOM TYKWER - COURS LOLA COURS (1998)

Fast & furious ?
« Cours Lola cours » aurait pu être le film de la génération X. Il est arrivé un peu tard (fin 1998), et de toutes façons après « Trainspotting ». N’empêche, il n’en reste pas moins un des films les plus novateurs de la décennie pré-motion capture.
Le maître d’œuvre du projet « Cours Lola cours », c’est Tom Tykwer. Touche à tout du cinéma indépendant allemand (il est crédité au générique de scénariste, réalisateur, producteur et compositeur de la BO, rien que ça …), il n’avait réalisé qu’une paire de films que personne avait vus. Et là, tout à coup, il va sortir un truc totalement hors normes, avec une mise en scène ultra speedée et un scénario totalement délirant.
Tom Tykwer
A la base, un couple de jeunes, Manni et Lola. Lui vivote et commence à s’engluer dans des trafics chelous, elle s’emmerde chez papa-maman dans un milieu bourgeois (une mère au foyer délaissée qui cherche le frisson amoureux dans l’horoscope, et un père directeur de banque qui se tape la sous-directrice et envisage très sérieusement le divorce). Après une première séquence euh … métaphysique ponctuée de mouvements délirants de caméra, les ressorts de l’intrigue se mettent en place. Un piqué vertigineux de caméra qui entre dans la maison de Lola pour finir sur un gros plan de téléphone qui sonne. A l’autre bout du fil, Manni. Mal barré. Un très gros paquet de pognon venant d’un trafic de bagnoles, qu’il doit remettre à un caïd qui rigole pas. Problème, il a connement perdu le pognon dans une rame de métro, et n’a plus que vingt minutes pour remettre le fric. Sinon il se fera buter. Lola ne sait pas quoi faire, mais veut à tout prix sauver son mec. Elle part au sprint le rejoindre, espérant trouver en route le bon plan qui va sauver son chéri.
Bon, ce genre de scénar, on l’a vu des milliards de fois. Sauf qu’ici il n’y a pas un film, mais trois. A partir du moment où Lola dévale les escaliers de sa baraque, un petit détail va survenir qui va perturber sa course folle. Et cette seconde gagnée ou perdue au démarrage va provoquer des réactions en chaîne, ses choix à elle, à Manni, vont être différents. Et au bout des vingt fatidiques minutes, l’issue aussi sera totalement différente… les trois séquences de vingt minutes sont quasiment filmées en temps réel, et les lumières se rallument dans la salle au bout d’une heure et quart. Autant dire que ça déménage à l’écran …
Lola & Manni
D’abord parce qu’il y a des « personnages », des gueules. La mignonne et plutôt glamour Franka Potente campe une Lola à cheveux rouges et Doc Martens, passant entre deux courses folles d’un calme olympien au milieu de situations qui partent en quenouille, à des montées d’adrénaline hurlantes (comme un autre héros de film allemand, Oskar, celui du « Tambour », et certainement pas par hasard, quand Lola s’énerve grave, elle crie dans les aigus jusqu’à casser les verres), et cette actrice pratiquement inconnue crève l’écran (et ne laissera pas insensible son réalisateur puisqu’ils formeront un couple à la ville). L’autre figure majeure du casting, c’est Manni (Moritz Bleibtreu), un peu paumé, qui fonce d’abord et réfléchit après, mais qui partage avec Lola une furieuse envie de se sortir de ce sac de nœuds dans lequel il s’est enlisé. Les seconds rôles forcent sur l’aspect caricatural de leur personnage et le rendent immédiatement mémorisable dans les différents scénarios qui s’enchaînent.
Techniquement, il n’y a rien de révolutionnaire, qui n’ait déjà été vu dans un film. Par contre, rarement les images collent aussi bien à l’histoire. Les sprints de Lola rythment la structure filmique. Et la tarte à la crème utilisée à toutes les sauces et plutôt à tort et à travers depuis vingt ans, à savoir le montage façon vidéo-clip épileptique, prend ici toute sa mesure et tombe sous l’évidence. D’autant plus que la musique (Tykwer aux machines et Potente pour quelques parties chantées) repose sur une techno survitaminée (genre Prodigy meets Chemical Brothers) qui renforce encore un peu plus l’aspect oppressant de ces courses contre la montre. Autre bonne idée de Tykwer, celle d’inclure à chaque « épisode » une séance d’animation représentant Lola descendant quatre à quatre les étages de sa maison. Certes pas une nouveauté dans un film « conventionnel », mais là aussi, cet intermède animé s’intègre parfaitement dans le rythme du scénario. Et puis, tant qu’à montrer trois déroulements d’histoire différents, Tykwer en faisant se succéder des polaroids à un rythme échevelé, nous évoque de façon tout juste perceptible à l’œil les destins différents des gens croisés par les protagonistes principaux.
Natural Born Killers ?
Et comme si ça ne suffisait pas dans ce crépitement d’images en mode rafale, Tykwer glisse des hommages au « A bout de souffle » (c’est tellement évident que personne ne semble s’en être aperçu). Le final du film de Godard est quasiment plagié dans une des fins de « Cours Lola cours », et entre les « épisodes », Manni et Lola discutent dans un lit de questions philosophiques, métaphysiques et existentielles just like Bebel et Jean Seberg dans la chambre de l’Hôtel de Suède. Sans compter évidemment tous les clichés et tics de réalisation pompés aux films d’action et aux polars de tout temps (ces gros plans récurrents sur le flingue de Manni qui dépasse de sa poche arrière quand il va braquer le supermarché, ou sur la boule d’ivoire dans le casino, le genre d’effets de caméra faciles qu’on a vu mille fois mais qui marchent toujours).

C’est bien simple, « Cours Lola cours » c’est aussi bon et évident qu’un titre de Chuck Berry … « Run Rudolph run » au hasard, évidemment…


ROBERTO ROSSELLINI - ROME VILLE OUVERTE (1945)

Sortie des ténèbres ...
« Rome ville ouverte » est un film qui compte. Pas seulement pour le cinéma italien, mais pour le cinéma tout court. Un de ces vieux films, qui de quelque côté qu’on l’envisage, est un classique, un incontournable.
Mais pour le septième art italien, « Rome … » est une pierre angulaire. Un des trois films (avec « Ossessione » de Visconti, relecture version glauque et sordide du « Facteur sonne toujours deux fois », et « Le voleur de bicyclette » de De Sica) qui tirent un trait sur un cinéma à la botte du régime mussolinien et le font entrer dans l’ère moderne, sinon son âge d’or qui durera jusque vers la fin des années 60 … Une période, liée à une certaine forme de cinéma-vérité proche du documentaire, que les livres d’Histoire retiendront sous le terme de néo-réalisme …
Roberto Rossellini
Rossellini revient de loin. On l’a beaucoup vu avec le fils de Mussolini, et ses premiers films étaient des commandes pour le régime fasciste. Collaboration volontaire ou forcée ? Les avis (très partagés) iront bon train et Rossellini ne se montrera jamais vraiment loquace et explicatif sur cette période. Toujours est-il que c’est durant les années fascistes qu’il s’est formé et aguerri dans la réalisation.
Dès 1943 et la destitution de Mussolini, Rossellini ébauche le projet de « Rome … ». Dans un pays vaincu, ruiné, dévasté et humilié militairement malgré le baroud acharné des nazis qui tiennent les grandes villes dont Rome, la préoccupation première ne va pas au cinéma. Rossellini devra faire avec des moyens de fortune, récupérant de la pellicule à droite à gauche, tournant souvent à la sauvette à la tombée de la nuit, jonglant avec les fréquentes coupures d’électricité, se contentant d’un casting au rabais … Mais il va aller à l’essentiel, souffler sur les braises encore chaudes d’une période terrible pour le peuple italien en situant son histoire au début 1944 (une allusion faite sur la bataille de Cassino, qui a « ouvert » Rome et l’Italie aux Alliés, permet de situer l’époque des faits) parmi le petit peuple romain. Les héros de « Rome … » sont des anonymes, ceux qui se battent contre le fascisme et le nazisme, ceux qui les aident, ceux qui les traquent, ceux qui profitent de cette période ou en subissent toutes les turpitudes.
La mort de Pina (Anna Magnani)
« Rome ville ouverte » est un drame grandiose. Qui contient la trame de dizaines d’autres. On est toujours un peu stupéfait de voir toutes les intrigues, grandes ou petites, mesquines ou héroïques, qui s’entrecroisent. Alors que l’on a affaire à un film low budget. Il est facile des décennies après de dire que ouais, y’a Fellini crédité au scénario, mais c’est sa première apparition dans un générique, on est encore très très loin des œuvres baroques qui en feront un des cinéastes les plus importants du siècle. De même, la présence dans un rôle essentiel de « Rome … » d’Anna Magnani n’est pas a priori un gage de succès, c’est une inconnue malgré ses presque deux décennies de tournage. En fait la seule (demi) star du générique, c’est Aldo Fabrizi, acteur comique connu, qui joue ici le rôle le plus tragique, celui d’un curé romain entré dans la Résistance.
Aldo Fabrizi
L’histoire de base, c’est celle de la quête et de la traque par les SS dans une Rome qui commence à sentir souffler le vent de la liberté d’un ingénieur communiste, chef d’un réseau de Résistants. Tout ça au milieu du petit peuple romain en butte aux rationnements alimentaires, pris entre deux feux dans des guérillas urbaines qui commencent à s’intensifier, mais qui sent que le vent de l’Histoire tourne et prend souvent des risques pour lutter contre l’occupant nazi. Anna Magnani incarne une de ces sans-grades, qui un peu par hasard, va prendre tous les risques pour planquer l’ingénieur recherché. Elle le payera de sa vie, au cours d’une scène d’anthologie où elle meurt, abattue d’une balle dans le dos lors d’une rafle des SS.
Comme dans tout drame, il y a quelqu’un qui tire les ficelles. Le machiavélique salaud intégral est ici l’officier supérieur nazi. Joué par l’inconnu (et qui le restera) Harry Feist. Ce type qui joue au chat et à la souris avec les protoganistes et leur entourage, qu’on me dise pas que le colonel Landa (Christoph Waltz) de « Inglorious Basterds » de Tarantino n’en est pas directement inspiré, je le croirais pas. Cet autour de cet être froid et calculateur que Rossellini ouvre des pistes et des suggestions inédites et inattendues qui font toute la richesse du film. C’est à travers cet officier que l’on entrevoit un monde de starlettes de café-théâtre prêtes à tout pour bien vivre en temps de guerre et de misère. Fallait quand même être gonflé dans l’Italie de 1945 pour suggérer de façon sans équivoque toute une faune interlope en quête de drogues, de produits et fringues de luxe, de parties fines, sur fond d’homosexualité féminine.
Harry Feist à la manoeuvre ...
Dans « Rome … », Rossellini est partisan. Il n’y a pas d’ambigüité. Les héros sont du « bon côté », meurent pour leurs idéaux, n’hésitent jamais dans leurs choix (le prêtre ne tergiverse pas entre liberté et religion), ne parlent pas sous la torture, n’hésitent pas à crever comme des chiens (l’exécution du prêtre, dans une scène finale qui prend aux tripes) pourvu qu’ils ne trahissent pas leur cause, leur besoin de liberté après deux décennies de chape de plomb fasciste.
« Rome ville ouverte » est un immense film, une épopée héroïque et réaliste, où l’on découvre à chaque visionnage des aspects, des détails nouveaux …

Tiens, un de ces détails et grain à moudre pour les psychanalistes, cartomanciens et autres numérologues du dimanche : l’officier nazi s’appelle Bergmann …


RICHARD ATTENBOROUGH - GANDHI (1982)

Peace & love ...
« Gandhi » c’est le film d’une vie. Celle du petit Indien moustachu qui a conduit à travers un parcours humain et politique hors norme son peuple et son pays à l’Indépendance. Mais aussi celle de Richard Attenborough qui a tourné un des meilleurs biopics de tous les temps …
Au début des années 30, Attenborough a une dizaine d’années. Son père l’emmène au cinéma. Dans les courts-métrages d’actualité, un reportage sur un voyage en Angleterre de Gandhi. Ce petit mec en pagne dans les frimas britanniques provoque l’hilarité de la salle. Attenborough n’en croit pas ses yeux et encore moins ses oreilles quand son père lui souffle que cet homme dont le bon peuple se moque est des plus grands de l’humanité. Le petit garçon est fasciné à vie par cet étrange personnage. Trente ans plus tard, Attenborough est devenu un bon acteur de second plan, se rend compte qu’il ne sera jamais David Niven ou Peter Sellers, passe de l’autre côté de la caméra et décide de faire un film sur Gandhi.
Ben Kingsley & Richard Attenborough
Il mettra vingt ans pour mener son idée un peu folle à terme. Le projet est un peu barge, parce qu’Attenborough n’envisage pas exactement la chose comme un téléfilm fauché. Il lorgnerait plutôt du côté de David Lean et de ses gigantesques épopées filmées (« Lawrence d’Arabie », « Docteur Jivago »). La société de production qu’a montée Attenborough fera plusieurs fois faillite, il sera lui-même au bord de la banqueroute. Cependant, dès que son projet a été connu, un anglo-indien du nom de Motilal Kothari s’y est intéressé. C’est lui qui organisera les premiers voyages de Attenborough en Inde, où il finira par rencontrer Indira Gandhi qui lui fera obtenir un rendez-vous avec son père (non, pas Gandhi) Nehru, compagnon politique de Gandhi et premier ministre de l’Inde. Lequel est enthousiaste mais a d’autres chats politiques et financiers à fouetter. L’obstination d’Attenborough et d’Indira Gandhi, devenue ministre de l’Information puis Premier Ministre, finiront par décider des producteurs anglais de sortir les livres sterlings. Attenborough aura l’argent des British et toutes les facilités de tournage, l’accès à tous les lieux et documents concernant Gandhi en Inde …
Commence alors le plus difficile, faire le film … La seule chose que Attenborough a en tête, c’est de coller à la réalité, de Gandhi et de l’Inde. Cela passera par des reconstitutions minutieuses (des lieux, des trains qui rythment la vie et les déplacements dans le sous-continent, des costumes, …). Le challenge aussi sera de mettre en scène des personnages physiquement crédibles (Gandhi notamment, petit, courbé, moustachu, chauve, et son inamovible pagne) parce que les acteurs de ce pan d’Histoire sont quasi contemporains, on été à maintes reprises décrits, photographiés, filmés … La clé de voûte du casting (le personnage de Gandhi) est fournie à Attenborough par John Hurt qui vient d’auditionner pour le rôle principal (Hurt est grand et blond, y’aurait eu du boulot pour les maquilleurs …) et croise dans le couloir un acteur quasi inconnu surtout adepte du théâtre venu lui aussi auditionner. Hurt fait demi-tour, retourne voir son pote Attenborough et lui dit en substance qu’il vient de croiser le Gandhi qu’il cherche… Cet acteur, qui plus est anglo-indien, c’est Ben Kingsley qui trouvera là le rôle de sa vie. Kingsley est un Gandhi plus vrai que nature, complètement « possédé » par son personnage (il passera les mois de tournage quasiment toujours vêtu d’un pagne), qui en plus d’une ressemblance physique naturellement perceptible, s’appropriera tous les « tics » de Gandhi, de sa démarche à son anglais à l’accent « exotique ». Une statuette aux Oscars viendra récompenser sa performance.
Ben Kingsley vs Gandhi
Un acteur, aussi impliqué soit-il, ne fait pas un film à lui seul. La distribution, vaste patchwork (Anglais, Indiens, Allemands, Américains, …) cumule choix risqués et heureux pour le résultat. Attenborough est parti d’un postulat d’une logique implacable : des Indiens pour jouer des Indiens, des Anglo-saxons pour les Anglais. Avec toujours le même soin du détail historique, les acteurs, sans en être les parfaits sosies, seront des « copies » très acceptables de leur personnage (Rohini Attangadi qui joue la femme de Gandhi, Roshan Seth dans le rôle de Nehru, Saeed Jaffrey dans celui de Patel, et beaucoup d’acteurs de théâtre anglais très proches physiquement des personnages historiques qu’ils interprètent). Deux « valeurs sûres » sont aussi au générique. Candice Bergen qui depuis des années tannait Attenborough pour avoir un  rôle, et qui la gloire venue se contentera malgré tout de courtes apparitions dans le rôle d’une journaliste-photographe de « Life Magazine ». Et puis le cas Martin Sheen qui après les premiers rôles dans « Badlands » de Malick et « Apocalypse now » de Coppola n’a qu’un second rôle, celui également d’un journaliste américain, qui a rencontré Gandhi en Afrique du Sud et suivra le parcours et le périple de celui qui l’a d’entrée impressionné. Impressionné, Sheen le sera aussi par la beauté et surtout la misère fière de l’Inde. Il reversera l’intégralité de son cachet à des associations luttant contre la famine en Inde. Anecdote : « Gandhi » voit pour la première dans un générique le nom de Daniel Day Lewis (la petite frappe qui veut barrer la route de Gandhi et de son ami prêtre dans une ruelle d’Afrique du Sud). Et puis, parce que Gandhi s’adressait à une multitude (300 millions d’habitants aux derniers jours de l’occupation britannique) d’Indiens, en ces temps où le trucage numérique n’était même pas du domaine du rêve ou de l’utopie, il faudra à Attenborough des foules de figurants Indiens. La seconde scène du film (la première est celle de l’assassinat de Gandhi), les obsèques reconstituées de Gandhi, 34 ans jour pour jour après les « vraies » et au même endroit, réunira à peu près 400 000 figurants venus quasi spontanément. Trois minutes dans le film pour une scène légendaire par sa démesure. Dix neuf caméras, forcément une seule prise (on ne positionne pas plusieurs fois une telle foule), et les trois quarts des images bonnes pour la poubelle, notamment à cause d’enfants qui gesticulaient, dansaient et sautaient dans tous les sens, ne comprenant pas vraiment de quoi il retournait …
Les obsèques reconstituées de Gandhi
Une entrée en matière qui relègue les filmos de Griffith, Cecil B. DeMille, Lean et autres adeptes de foules en mouvement au rang de metteurs en scène intimistes. Cette scène initiale tranche avec la suivante et la solitude d’un Gandhi venu exercer ses talents de tout jeune avocat au sein de la communauté immigrée (et brimée) indienne en Afrique du Sud. Le reste du film sera dès lors strictement chronologique. Attenborough, même si on sent toute sa révérence et son admiration à celui qui deviendra Mahatma (littéralement Grande Âme) Gandhi, évite l’hagiographie béate. Gandhi n’est pas l’Elu, le Prophète, la divinité à la science infuse. Gandhi s’est construit face à l’adversité, opposant volonté et abnégation à toutes formes de force et d’injustice. De façon quasi intuitive, il créera les concepts qui ont fait florès chez tous les soixante-huitards-alternos-pacifistes all around the world, ceux de résistance passive, non-violence et de non collaboration … Sur la seule foi malgré son aspect chétif d’une force de caractère et d’un charisme hors normes (il en prendra souvent physiquement plein la gueule, et passera en tout six ans en prison), trouvant les mots ou l’attitude justes et déstabilisants pour ses interlocuteurs (cette scène où le juge anglais et toute l’assistance (anglaise) du tribunal se lèvent à son entrée alors qu’il comparaît (en pagne comme d’hab) pour rébellion à l’autorité).
Martin Sheen & Ben Kingsley
« Gandhi » est plein de scènes chocs. Celle où sous les coups de matraque répétés il se relève pour brûler les papiers de séjour infâmants de la communauté hindoue d’Afrique du Sud. Celle où des Indiens avancent par groupe de cinq vers une usine de sel gardée par l’armée et ne cherchent jamais à esquiver les bastonnades qui tombent sur eux, évacués et soignés par leurs femmes. Celle où un colonel anglais ordonne froidement et sans aucun état d’âme par la suite devant le tribunal militaire l’exécution d’une foule réunie pacifiquement (1200 morts et l’élément déclencheur, notamment par la couverture médiatique organisée par le journaliste joué par Martin Sheen du processus d’indépendance de l’Inde).
« Gandhi » est aussi plein de scènes de foule grandioses. Celle de ses obsèques bien sûr. Mais aussi celle de la première apparition de Gandhi à une assemblée du Parti du Congrès (5000 figurants sous une tente qui a bien failli leur tomber dessus). L’arrivée de Gandhi accueilli en héros en Inde après ses « aventures » sud-africaines. La Marche du Sel (Gandhi part à pied de son ashram pour aller récolter sur le littoral le sel surtaxé par l’administration anglaise, traversant le pays au milieu de foules de plus en plus colossales).
« Gandhi » le film est logiquement centré sur Gandhi l’homme. En évitant les pièges souvent inhérents à ce genre d’exercice, le portrait psychologique plombant et pénible, et l’escamotage du contexte souvent rendu de façon incompréhensible. Bon, le film dure plus de trois heures, on peut montrer plein de choses. Mais le talent, ou le coup de génie (sans lendemain) d’Attenborough, c’est d’avoir parfaitement rendu la situation complexe de l’Inde. Régie par une administration coloniale d’un autre temps (tous le faste désuet et ringard perpétué depuis l’époque victorienne), qui ne doit sa survie qu’à de solides inerties locales (cette société locale de castes, avec quelques nantis-collabos tenant le bien peu révolutionnaire Parti du Congrès entre leurs pattes pour s’enrichir encore plus auprès et avec la bénédiction de la puissance coloniale). Mis à part Nehru et dans une moindre mesure Patel, Gandhi se heurtera aussi à la force d’inertie de ces notables. Un pays immense partagé entre deux communautés religieuses (hindoue et musulmane) qui dès l’Indépendance obtenue, vont s’entretuer, aboutissant très vite à la partition pakistanaise. Le plus dur combat de Gandhi, et le seul qu’il ne gagnera pas, sera de faire de l’Inde un pays uni, et même ses habituelles grèves de la faim pour faire cesser les violences ethnico-religieuses ne seront plus couronnées de succès. Il finira d’ailleurs sous les balles d’un intégriste religieux (quoi d’autre) de son propre « camp ».
La marche du sel
Gandhi fut un personnage à l’incroyable aura (témoin son premier cercle de disciples fidèles venus d’autres races ou religions et bien mis en valeur dans le film), totalement détaché des honneurs (il refusera toujours le rôle de leader politique que tous lui laissaient) et de la réussite matérielle (il passera l’essentiel de sa vie en pleine cambrousse dans son ashram, vivant à moitié à poil, tissant lui-même ses vêtements). Seul reproche « historique » à faire au film, le balayage sous le tapis de certains points « curieux » du personnage, ses théories mystiques plus ou moins fumeuses énoncées dans ses bouquins, et sa lourde erreur d’appréciation sur Hitler et le nazisme (il est toujours resté opposé à une guerre contre l’Allemagne, malgré sa connaissance des atrocités commises).
Le succès de « Gandhi » dépassera toutes les espérances. Attenborough deviendra Sir Attenborough, le film obtiendra l’année de sa sortie huit Oscars. Attenborough avoue d’ailleurs qu’il en attendait beaucoup moins, il savait qu’il n’avait réalisé qu’un film conventionnel, certes aux moyens démesurés, mais un film conventionnel quand même, et reconnaissait que le « E.T. » de Spielberg, concurrent (laminé, quatre misérables statuettes de second plan) aux Oscars était beaucoup plus novateur.

Réédition BluRay de 2008 somptueuse, tant du point de vue technique (remaster d’une limpidité absolue), que par ses heures de bonus, souvent (très) intéressants.


VOLKER SCHLÖNDORFF - LE TAMBOUR (1979)

Tambour majeur ...
C’est pas être trop mesquin pour lui que de rappeler  que c’est « Le tambour » qui vaudra à Volker Schöndorff d’avoir une rubrique dans toute encyclopédie du cinéma qui se respecte. Non pas que le reste de sa carrière ait été minable, y’a même quelques pelloches assez connues des amateurs de séances nocturnes des chaînes « culturelles », mais bon, « Le tambour » enterre quand même un peu tout le reste de sa filmographie…
Parce qu’on parle pas là d’un petit film sympa venu d’une Allemagne qui commençait à se relever cinématographiquement parlant, mais d’un truc qui a partagé une Palme d’Or à Cannes avec rien de moins que « Apocalypse now ». Certes les distinctions n’engagent que ceux qui les décernent, mais y’a des références qui trompent pas …
Volker Schlöndorff & David Bennent
Schöndorff, c’est classique du cinéma allemand des 70’s, avec le traumatisme à expier de la période nazie, comme dans un autre registre Fassbinder (y’avait aussi Werner Herzog, mais lui était à l’Ouest, pas par rapport aux deux Allemagne, mais à l’Ouest vraiment, quoi …), ces réalisateurs qui situent souvent leurs œuvres dans cette période noire de leur Histoire, et un peu aussi de celle de tout le Monde, d’ailleurs …
L’essentiel du « Tambour » se situe à Dantzig, en Pologne au début des faits, et couvre la période 1935-1945. Mais les évènements historiques, s’ils influent évidemment sur l’intrigue, ne servent que de marqueurs. « Le Tambour » n’est pas un film politique ou historique. C’est une somme de plus de deux heures vingt, axée autour d’un personnage principal et de ses pérégrinations dans cette période troublée. « Le tambour » est une fresque bizarre, picaresque et sans trop d’équivalents. A part « Barry Lyndon » avec lequel je perçois beaucoup de similitudes. Sauf que chez Kubrick le héros est un indolent qui traîne son apathie au milieu d’intrigues et de personnages hauts en couleurs. Le héros du « Tambour » est par contre celui qui agit sur l’histoire de ceux qui l’entourent. « Le Tambour », c’est Oskar. Qui d’entrée démarre dans la vie avec un petit problème, il a bien une mère, qui est un peu volage, et se retrouve avec deux pères. Oskar n’est pas très à l’aise dans ce cocon familial assez particulier (c’est lui le narrateur du film), d’autant qu’à ses trois parents s’ajoutent des ancêtres pour le moins atypiques. Le jour de ses trois ans, Oskar décide de ne plus grandir, et « suicide » sa croissance en se jetant dans un escalier. Il en réchappe et son vœu sera exaucé. Dorénavant, Oskar gardera la taille d’un gamin de trois ans.
Scène de ménage à trois ...
Il convient à cet effet de saluer la performance du jeune suisse David Bennent, un enfant de la balle (père acteur et mère danseuse), qui bien qu’âgé de treize ans au moment du tournage, a lui eu réellement des problèmes de croissance et paraît beaucoup plus jeune. Et Bennent porte le film sur ses épaules, est quasiment à l’image tout le temps et sert une prestation d’acteur de haut niveau, ne se contentant pas des quelques mimiques qui sont souvent le lot commun des tout jeunes acteurs. D’autant qu’Oskar aura une enfance pour le moins singulière, faut vraiment jouer, être acteur, pour rendre tout cela correctement. Bien aidé d’ailleurs par le reste de la distribution, avec mention particulière pour un épatant Mario Adorf (un des deux pères) et un Aznavour qui dans un second rôle livre ce qui doit être sa meilleure prestation devant une caméra …
Charles Aznavour & Angela Winkler, excellents
On suit Oskar, tout de même un peu caractériel dans sa découverte du monde des adultes, des nazis, des phénomènes de cirque, de la guerre, de l’amour, de la mort dans une sarabande très tongue-in-cheek. Même si parfois on frôle des délires montypythonesques quand Oskar et son tambour font perdre le rythme aux musiciens nazis et le discours-parade de propagande se transforme en bal populaire au son d’une valse de Strauss. Ah, parce que je vous pas dit, Oskar en pince pour les tambours d’enfants, et ne se sépare jamais du sien quelles que soient les circonstances, comme un fil rouge un peu crétin de sa vie. Le regard naïf d’Oskar sur le monde des adultes et leurs vicissitudes n’empêche pas à l’occasion des réflexions d’une justesse cruelle et terrifiante, ainsi à propos de la montée du nazisme et du soutien populaire dont il bénéficiait dans les années 30 : « Un peuple crédule qui croyait au Père Noel. En réalité le Père Noel était le préposé au gaz. »
La monstrueuse parade ?
« Le tambour » est adapté d’un bouquin à succès de l’écrivain allemand Gunther Grass. Un livre réputé inadaptable, mais le challenge a été relevé avec brio par Schöndorff et Jean-Claude Carrière, et le film, un des plus gros budgets du cinéma allemand est in fine une œuvre cosmopolite dans lequel financement, personnel technique et acteurs, sont issus de multiples nationalités. Le tout produisant une œuvre d’une justesse et d’une précision souvent bluffantes. On sent en Schöndorff l’amoureux et le connaisseur de ses classiques, louvoyant avec talent entre sérieux, ironie et hommages référencés (les séquences avec les nains de cirque renvoient immanquablement au « Freaks » de Todd Browning), évitant les effets faciles ou racoleurs (l’histoire d’amour entre Oskar et Maria, la servante de son père).

Le postulat de départ du film, cette histoire d’enfant qui « refuse » de grandir, est bien légère, mais « Le Tambour » soutenu par un scénario en béton qui nous emporte dans les méandres d’une époque pour le moins difficile sans temps mort ni répit, est captivant de bout en bout. L’exemple du film tout-public, et qui permet une lecture à tous niveaux …


ROMAN POLANSKI - LE PIANISTE (2002)

Survival ...
« Le Pianiste », c’est malgré les réalisations qui ont suivi et suivent encore, l’épitaphe cinématographique de Polanski. Le film qui résume sa vie, et pas forcément (pas du tout ?) son œuvre. C’est un film-thérapie, un film-exutoire, un film de divan d’analyste. Polanski, l’enfant grandi dans les années 40 et miraculeusement réchappé du grand massacre des Juifs polonais ne pouvait pas ne pas s’attaquer à ce thème.
Adrian Brody & Roman Polanski
Alors, formellement ou esthétiquement, « Le pianiste » n’est pas son meilleur film. C’est malgré tout son plus personnel, et pour peu qu’on ait un cœur en état d’insuffler des émotions, son plus touchant. Bon, évidemment, la leçon d’Histoire, les bons sentiments et cette atmosphère de mélo perpétuel, ont eu deux conséquences : la méfiance de certains, jugeant le film « too much ». Corollaire, des récompenses par la « profession » innombrables, dont trois Oscars (et 47698 Césars, qui comme chacun sait, sont au cinéma ce qu’Annie Cordy est à Bessie Smith).
Moi, « Le Pianiste », j’suis preneur. A mille pour cent. Et d’autant plus ces jours-ci, où l’on voit à longueur de 20 Heures, des journaleux nous faire le « devoir de mémoire » sur l’anniversaire de la libération d’Auschwitz. Pendant que d’autres de leurs congénères (plutôt cons tout court d’ailleurs) remettent un colifichet honorifique au maire FN de Hénin-Beaumont, au crâne bien dégagé derrière les oreilles et bien plein de remugles idéologiques pourris. Comme si on avait pas assez donné cette année en matière d’exposition faite aux cinglés intolérants. Et voir l’épouvantail Arlette Chabot (groupie insatisfaite du piteux Chirac, mais qui au moins, lui, n’a jamais transigé avec ces fachos-là), présidente de ce jury honteux avaler une colonie de couleuvres pour nous expliquer que politiquement parlant, c’est une distinction que ce pantin mérite … ‘tain, y’a des coups de pied au cul qui se perdent. Eh, Arlette, regarde ce qu’a déjà fait ce mec dans son bled, tu comprendras peut-être que vous êtes quelques-uns à avoir touché le fond …

Bon, « Le Pianiste ». Qui est en gros un biopic. Qui aurait pu être celui de Polanski lui-même. Il a préféré tourner la vie, la survie plutôt entre 1939 et 1945 de Wladislaw Szpilman, pianiste officiel et surdoué de la radio polonaise au moment où les troupes nazies envahissent la Pologne. Szpilman n’est apparemment pas un bonimenteur, le livre racontant sa traversée de la guerre publié en 1946, lui a valu bien des ennuis et une quasi-censure de la part des autorités communistes polonaises (un Juif sauvé par un haut officier SS et pas par l’Armée Rouge, les camarades rigolaient pas avec ça). « Le Pianiste » est un survival, avec des nazis à la place des zombies. C’est la grande Histoire vue par la « petite » de Szpilman. Et là, il n’est plus question d’idéologie. Szpilman est pris dans un engrenage où les salauds ne sont pas tous Allemands, et les types bien pas tous Polaks ou Juifs, où beaucoup cherchent à sauver ce qui peut encore l’être (leur vie, tout simplement) et louvoient dangereusement entre grandeur et bassesse. Il y a les bons et les méchants, et toutes les nuances entre les deux. La guerre déshumanise, et fabrique plus souvent des lâches que des héros.
Szpilman n’échappe pas à la règle. C’est le type qui vit à travers la musique et son piano, le reste lui étant souvent accessoire. Mais pas toujours. Il vend son piano une misère pour que sa famille puisse s’acheter à manger, il est lucide et fataliste devant les premières pancartes interdisant l’entrée de certains établissements à des Juifs, envoie bouler les juifs collabos. Et puis, lentement, insidieusement, quand le cauchemar meurtrier s’amplifie et qu’il faut à chaque instant assurer sa pitance puis sauver sa peau, Szpilman « lâche » les valeurs et les idéaux, jouant dans des bars pour juifs chelous gagnant de l’argent quand d’autres crèvent de faim, suppliant les miliciens juifs pour améliorer son ordinaire et celui de ses proches, devenant peu à peu un pantin sans valeurs ou morale, uniquement préoccupé de sa survie. Juste un type qui veut sauver sa peau au milieu de cette barbarie, rythmée par des intertitres qui indiquent les dates de cette période qui va de la blitzkrieg polonaise à la libération des camps de déportés par l’armée russe.

Polanski nous montre ce type aux prises avec la folie de ses congénères et de leur attitude de plus en plus incompréhensible, anormale, à mesure que la guerre et son convoi de misères avancent. Et parce que Polanski sait de quoi il parle mais aussi comment on filme, il évite les clichés. Celui de l’allégorie qui ferait passer des symboles au-dessus de l’histoire, celui du « tout est bien qui finit bien » (y’ des pourris qui s’en sortent, et des mecs bien qui crèvent). Il y a des plans d’une beauté à couper le souffle, comme celui où l’on voit Szpilman escalader le mur du ghetto de Varsovie pour revenir dans cet espace dont il s’est évadé quelques mois plus tôt, et qui d’endroit pas vraiment folichon est devenu un paysage de ruines lunaires après l’insurrection. Il y a des scènes d’une dureté glaçante, quand un officier nazi flingue d’une balle dans la nuque des juifs choisis au hasard dans une procession de travailleurs contraints, quand deux vieux affamés se battent pour une boîte de conserve qui se renverse et que l’un finit par bouffer à même le sol. D’autres sont d’une poésie irréelle notamment lorsque Szpilman, pour ne pas faire du bruit qui trahirait sa présence joue du piano sans même effleurer les touches et vit littéralement cette musique qu’il n’entend que dans sa tête.

Szpilman, c’est Adrien Brody, qui à même pas trente ans trouve là ce qui sera certainement le rôle de sa vie, composant entre sobriété du jeu et techniques de l’Actor’s Studio (il a perdu quinze kilos pendant le tournage et a appris à jouer du piano, même si ce n’est pas lui qu’on entend tout le temps). Dans ce casting de seconds couteaux, il ne cherche pas à écraser le film, est crédible de bout en bout dans un jeu tout en retenue.
Polanski est lui, comme souvent, parfait derrière la caméra. Il réussit en mettre en parallèle la survie de son personnage principal dans cette boucherie organisée et les grands faits marquants de l’histoire de Varsovie et de la Pologne au début des années 40. Une grande partie du « Pianiste » a été tournée sur les lieux mêmes où se passe l’action, dans ce qui fut le ghetto juif de Varsovie. Perso, je trouve quand même assez mesquine l’attitude de quelques-uns qui a la sortie du film n’y ont vu qu’un mélo larmoyant et émotionnel, limite une machine à Oscars.

Prévert a écrit dans un poème fameux que la guerre était une connerie. Polanski a dit la même chose. Avec une caméra …


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