WILCO - YANKEE HOTEL FOXTROT (2002)


Fallait pas ...

Oh non, fallait pas se pointer avec un disque aussi bon chez les gros cigares de chez Reprise (le label) et de Warner (la maison-mère). Parce que les comptables qui prétendent s’occuper de musique (et accessoirement y connaître quelque chose), ils ont toussé quand Jeff Tweedy est venu leur faire écouter les bandes de son nouveau disque « Yankee Hotel Foxtrot ». Et les hommes de l’art(gent) n’ont pas voulu de pareille chose.
Quoi, ce Wilco, considéré par beaucoup comme le meilleur groupe de classic rock étatsunien, auteur de choses comme « Being there » ou « Summerteeth », qui faisaient tripper tous les tenants d’une americana moderne, et promis s’il avait continué sur la lancée à un grand avenir dans le rock pour stades, voilà t-il pas qu’il se pointe avec un disque de … pop anglaise, et encore de la pop qui semble agencée par quelque savant fou. Un disque qui a l’outrecuidance de commencer par le plus mauvais titre (« I am trying to break … ») des onze, de quoi faire fuir le client (euh, pardon, l’amateur de musique), qui sera quelque peu rebuté par une intro désordonnée, une mélodie feignasse, la voix endormie de Jeff Tweedy, … du n’importe quoi maîtrisé, mais un peu du n’importe quoi quand même …  Le disque dans son ensemble se verra refusé par la maison de disques, le contrat sera rendu à Wilco, qui malgré sa bonne réputation, cherchera un label pendant des mois, avant d’être signé par l’indépendant Nonesuch (distribué par ... Warner, comprenne qui pourra). Les ventes conséquentes de « Yankee … » et des suivants fera que les deux parties auront tout lieu de se réjouir de cette coopération, jusqu’à ce que Wilco crée sa propre structure (dBpm) pour son dernier (et très excellent « The whole love »). Fin de la parenthèse gros sous …
Car pour la musique, y’a pas débat. « Yankee Hotel foxtrot » est un monument, pour moi le meilleur de Wilco et un des tout meilleurs disques des années 2000. Il y a dans ces onze titres des mélodies, des trouvailles que l’on croyait impossibles à entendre tant dans ce qu’on appellera faute de mieux le classic rock, tout semblait déjà avoir été fait et refait depuis des lustres. Le cœur du disque est monumental, de « War on war » à « I’m the man loves you », un enchaînement de cinq titres comme on n’en fait plus, je vous le dis ma bonne dame … Et on a beau les passer en boucle, on n’arrive pas à savoir si on préfère l’énorme nostalgia évoquée par l’autobiographique « Heavy metal drummer », la folie de « I’m the man … » (ses « whouhou » à la « Sympathy for the Devil », ses riffs rhythm’n’blues, ses sonorités hendrixiennes, le genre de fusion après laquelle les laborieux Red Hot Chili Peppers courent depuis vingt cinq ans), la merveilleuse ballade mid-tempo de « Jesus, etc … », les gargouillis de guitares et la mélodie sautillante de « War on war », ou le rock down tempo avec ses synthés apocalyptiques au final de « Ashes of american flag ».
Et le restant, autour, est pas mal également. Malgré l’assez ardu titre d’ouverture, (qui trouve son écho symétrique dans le final de la dernière piste avec ses synthés rappelant ceux des plages instrumentales de « Heroes » de Bowie), on en connaît beaucoup, en couverture de mags musicaux, qui aimeraient bien avoir été capables de glisser ne serait-ce qu’une des chansons « moyennes » de ce disque sur leurs rondelles à eux.
Beaucoup de choses ont été dites et écrites sur ce disque. Notamment la surévaluation du rôle du frangin Bruitos, la mouche du coche noisy Jim O’Rourke (le cinquième Sonic Youth d’avant la débandade), sous prétexte que son nom figurait au générique de ce « Yankee Hotel Foxtrot ». Il n’est crédité que du mixage (les Wilco sont à l’époque quatre en studio et six sur scène, pas manchots, n’ont besoin de personne pour jouer sur leurs disques, et celui-ci ils l’ont produit), et cet aspect parfois noisy-bruitiste qu’on trouve dans les titres, le groupe l’a par la suite fait sans lui. Ce côté sonore un peu bourdonnant, parasité, plus rarement abscons et dissonant a valu à Wilco le qualificatif à cette époque de « Radiohead américain », le parallèle étant fait entre l’évolution des uns et des autres de « OK computer » à « Kid A » et de « Summerteeth » à « Yankee … ». Qu’on puisse comparer les endives blettes d’Oxford à Wilco relève d’une excellente performance à des tests de surdité ou de mauvaise foi, voire des deux …

Des mêmes sur ce blog :
The Whole Love 

5 commentaires:

  1. C'est vrai, c'est pas comparable... les endives blettes, c'est mieux...

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  2. Pourquoi faut toujours que tu dises du mal pour dire du bien.;)
    Bon, Wilco, ça fait parti des groupes que je connais de très loin, entendu des extraits régulièrement à l'époque chez Lenoir. "Heavy Metal Drummer" tu sens aussi que Grandaddy était passé par là. Enfin c'est un de ces groupes sur ma liste de "à s'y mettre, ça va probablement te plaire". Au début c'était quand même largement plus centré sur un alt-rock-country, à l'époque de Uncle Tupelo. C'est au fur et à mesure qu'ils se sont "classicrockisé" je crois, jusqu'à donner dans le west-coast carrément sur leurs derniers albums.

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    1. West-coast ? Diable ... j'ai des doutes, en tout cas pas le dernier ...

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    2. Oui, en fait je voulais dire sur Sky Blue Sky, mais depuis je ne sais même pas combien d'albums ils ont sorti donc je suis out of the loop.

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