ROB REINER - QUAND HARRY RENCONTRE SALLY (1989)


Dirty Harry & Sally goes round ...

Dans sa carrière Rob Reiner, en plus de quelques films à succès (le gentillounet « Le Président et Miss Wade », le très bon « Stand by me »), peut se targuer d’avoir réalisé deux films « culte ». Le faux documentaire plus vrai que nature sur le monde du rock du début des 80’s « Spinal Tap », et une des comédies, si ce n’est la comédie qui restera des mêmes années 80, cet étonnant « When  Harry met Sally ».
Qui n’est pas une de ces comédies grasses de l’époque que l’on a un peu honte de regarder genre les séries « Flic de Beverly Hills », ou « Y’a t-il un flic … un pilote .. ? », mais un film tout en douceur, délicatesse, et surtout subtilité.
L’histoire est on ne peut plus simple : des tranches de la vie de deux personnages (Harry et Sally, comment ça, vous aviez deviné ?) qui se rencontrent lors d’un covoiturage de circonstance les amenant de Chicago à New York jusqu’aux fêtes du Nouvel An onze ans plus tard … Le scénario est sans surprise, le dénouement quasiment contenu dans le titre …
Billy Crystal, Bruno Kirby, Carrie Fisher, Meg Ryan
Et ça fonctionne pendant une heure et demie. Parce que le film est fait par des gens qui se connaissent, Rob Reiner, Billy Crystal (Harry) et Bruno Kirby (Jess, copain de Harry) sont potes et un rien déjantés dans la vraie vie, Reiner et la co-scénariste et co-productrice Nora Ephron sont également amis et ont mis beaucoup d’eux-mêmes dans les personnages et les caractères. Et c’est cette équipe, plutôt qu’un directeur de casting, qui a choisi les deux rôles féminins majeurs, Meg Ryan (Sally) et Carrie Fisher (la princesse Leia de « Stars Wars », déjà un peu tombée dans l’oubli et qui est ici Marie, la copine de Sally). Cette fine équipe a beaucoup écrit, mais a parfois laissé l’improvisation prendre le dessus (dans la scène du musée où Harry parle avec un drôle d’accent (asiatique ?), il se lance dans une tirade non écrite, et on peut voir Meg Ryan jeter furtivement un regard inquiet et interrogateur vers la caméra – la scène a été conservée – avant de suivre Billy Crystal dans son jeu). Le film est rempli de dialogues (la plupart lancés par Harry, cynique, odieux, dépressif et désabusé) et de scènes (la fameuse simulation d’orgasme de Sally en plein restaurant) qui sont devenus cultes.
Evidemment, les personnages (des bobos), leurs caractères (des dépressifs qui cherchent l’amour d’une nuit ou de leur vie) et le lieu du film (New York), ça fait clignoter un nom, celui de Woody Allen. Et « Quand Harry rencontre Sally » est en même temps un hommage et un pastiche. Et on n’aurait pas été surpris de voir dans une scène Sally et Harry filmés de dos discuter à l’aube sur un banc de Riverview Terrace, face au Queens. D’ailleurs Reiner avoue dans les bonus du Dvd qu’il a du renoncer  à quelques-uns de ses premiers choix de lieux de tournage, se rendant compte que Woody Allen y avait déjà tourné des scènes. « Harry & Sally », en plus d’être par bien des aspects le meilleur film que Allen a oublié de tourner, partage avec ceux du binoclard une bande-son jazzy (et pour moi très pénible, mais ça colle à peu près avec le côté branchouille chic des personnages). Ici, sera révélé (honte à toi, Reiner) l’insignifiant centriste Harry Connick Jr qui lancera sa carrière grâce aux bluettes geignardes de la B.O.
La fameuse scène au restaurant (au second plan, la mère de Rob Reiner qui va commander "la même chose" que Sally)
On sent qu’il y a de la part des protagonistes impliqués dans ce film un souci quasi-obsessionnel de soigner le détail, de renvoyer à d’autres comédies, à d’autres films (le « Casablanca » de Curtiz évidemment, sujet de discussions et dont on voit des extraits), de faire des personnages des répliques de « vraies » célébrités (le look de Meg Ryan au début, c’est un copier-coller de la Farah Fawcett de « Drôles de dames », cinq ans après dans la scène de l’avion, c’est la réplique d’une patineuse people). Le film repose essentiellement sur le contraste entre un Harry planqué derrière sa carapace de goujat désinvolte et une Sally très romantique. C’est l’évolution lente de leurs caractères respectifs au cours des années qui est disséquée dans le film avec une légèreté, un humour et une justesse de ton qui en font tout le charme. On ne rit pas à gorge déployée devant trois gags énormes, mais on garde en permanence un sourire en coin devant ce film qui fonctionne à plusieurs niveaux.
« Quand Harry rencontre Sally » sera un succès international considérable. Le film fera de ses deux têtes d’affiche Billy Crystal et Meg Ryan deux des acteurs les plus bankables d’Hollywood, le premier en polissant quand même pas mal son humour finira présentateur quasi attitré de la cérémonie des Oscars, la seconde en tenant le rôle principal dans des blockbusters des 90’s (notamment « Nuits blanches à Seattle » de … Nora Ephron, le monde est petit), avant de progressivement disparaître du haut de l’affiche. Pour Rob Reiner, ce film marquera la fin de sa meilleure période artistique. Alors qu’il était en plein divorce au début du projet du film, il fera comme son personnage d’Harry et rencontrera l’amour (et le mariage) pendant le tournage. Quand je vous disais que ce film sentait le vécu …

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12 commentaires:

  1. Tu nous avais pas dit que t'étais fleur bleue, comme ça... Pas vu, toujours eu peur que ce soit trop bavard et... fleur bleue justement. Un jour, peut-être...

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    1. J'y crois pas ... le type qui a vu 425 films avec julie depardieu ET clovis cornillac il a pas vu celui-là ...
      Et comme il l'a pas vu, il le trouve bavard ... J'sais pas là, à part "le monde du silence" et "le chanteur de jazz", je me demande ce qui pourrait t'intéresser ...

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    2. Ou un "pornif à deux balluches des 70's"...
      Mais pourquoi y'a que sur ton blog que ces p*tain de fenêtres publicitaires à la c*n s'ouvrent ? Sur l'Idiot, ça le fait pas...

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    3. Il fait du pognon sur notre dos.
      (je dis ça, je les ais pas moi, ces fenêtres)
      J'ai vu les premiers teasers du nouveau film de Jaoui. Plutôt rigolo. Mais faut voir, je n'ai été vraiùent convaincu par aucun de ses films après le premier, qui déjà était en dessous de ce qu'ils avaient fait avant (Comme une image était un peu castastrophique quand même). Mais putain par contre, elle a pris cher. En terme de poids je veux dire. (je sais, c'est nul)

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    4. Des fenêtres de pub sur le blog ? Ben, t'as dû mater du pornif des 70's en streaming et ton navigateur il a pécho la chtouille ...

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  2. Quand même, quelle drôle d'allergie au jazz tu nous fait...
    Ca fait une éternité que je ne l'ai pas vu celui-là. La scène de l'orgasme, avec la réplique qui tue (une vieille qui demande à la serveuse "Je veux la même chose qu'elle") est indémodable.
    Le tragique là-dedans c'est le massacre que Meg Ryan, alors le plus charmant petit minois d'Hollywood, va s'infliger en passant sous le scalpel, elle ne ressemble littéralement plus à rien. Terrible. Elle n'a pas du entendre la recommandation d'Emmanuelle Béart qui, ayant constaté le ratage de la sienne, de chirurgie, incite à ne pas y avoir recours... Le dernière fois que je l'ai vu c'est dans In The Cut, thriller un peu chaud de Jane Campion, pas génial mais pas inintéressant (et puis tout film avec Jennifer Jason Leigh mérite une vision de toute façon).

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    1. Sans compter Mylène, Nicole (Kidman)... D'où ça vient ce refus de vieillir ? Pffff, on est encore en plein dans l'idéologie soixante-huitarde (la nature doit toujours céder face aux pulsions et désidératas de l'individu)... Vite, Zemmour for president ! :)
      D'après la B-A, il semblerait bien que ce soit bavard comme film...

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    2. La vieille qui veut la même chose, c'est la mère à Rob Reiner ... La chirurgie esthétique présente des avantages : Meg Ryan maintenant, elle peut tourner dans un remake féminin d'elephant man sans maquillage.
      Mylène Farmer, c'est pour faire comme les BMW X5 volées, une seconde carrière en Russie ...

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  3. Mouais, enfin, New York, le couple "middle class" cool, le parc, l'automne, le côté moitié romantique moitié "je parle cul avec les copains (ou copines)", ça a pas influencé des trucs du genre "Mary à tous prix", "Sex in the city" ou "Desperate Housewifes", ça ?

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    1. Mary à tout prix ? Rien à voir selon moi ... Les séries télé, je regarde pas, aucune idée ...
      Autant Woody Allen dans les films où il se met en scène est une influence évidente, autant les films que "Harry met Sally" a pu influencer, je vois pas ... il doit y en avoir, ne serait-ce que parce qu'il a fait un carton au box-office et qu'on a dû essayer de copier la recette ...

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    2. Ouais, Woody c'est quand même autre chose hein... "Harry meet Sally" c'est une bonne comédie romantique et basta, mais son influence doit se ressentir un peu dans tous les films du genre depuis, c'est devenu un peu un modèle. Je suis d'accord "Mary à tout prix" n'a vraiment pas grand chose à voir, les frêres Farrelly étant quand même la maille au dessus en terme de comédie et de cinéma. Même si Spinal Tap était quand même assez drôle aussi, surtout si on est un peu amateur de hard qui tâche. Princess Bride n'était pas mal du tout dans mon souvenir aussi.

      Jamais regardé "Desperate Housewives", mais gros fan de "Weeds" (très trash, très politiquement incorrect). FInalement,

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    3. "Mary ..." à la réflexion, y'a un point commun dans le montage, avec d'un côté les intermèdes en chansons naïves de Jonathan Richman, et de l'autre les vieux couples (des acteurs plus vrais que nature) qui racontent leurs rencontres ... De Reiner, le meilleur, cahiers du cinéma parlant, c'est "stand by me", l'adaptation d'une nouvelle de stephen king, avec ce road-movie poétique de gosses qui recherchent un cadavre ...

      Allen, je suis pas fan au-delà ... des trucs géniaux, pas mal de redites aussi dans sa filmo ...y'en a que j'ai tendance à confondre ou à mélanger ...

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