NIGHTMARES ON WAX - SMOKERS DELIGHT (1995)


 Enfumage ?

Bon, va falloir faire gaffe à ce que j’écris. Ce Cd est paru sous étiquette WARP, et un blog voisin étant le repaire du fan-club du label… Alors, ce « Smokers delight », d’abord il est long (une heure et quart), je veux dire …vraiment long … Trop long, même, avec des titres où il ne se passe rien étirés au-delà du bon goût et du raisonnable. Faire tourner en boucle une structure rythmique, faut savoir s’arrêter, ou la faire évoluer … quoique faire tourner  quand le disque s’appelle « Smokers delight », ça peut sembler logique, enfin bon …
Allez George, quoi, fais tourner le oinj ...
Nightmares On Wax est le pseudo d’un DJ – joueur de disquettes du nom de George Evelyn ou DJ Ease selon les jours (c’est quoi, cette manie d’utiliser des pseudos dans la techno, ils peuvent pas s’appeler Lester Gangbangs comme tout le monde ?). Le susnommé George a apparemment tiré sur le joint plus que de raison et l’essentiel du disque repose sur de grosses basses dub. Soit. Ça tombe pas trop mal, j’aime bien le dub. Sauf que s’il est venu à l’idée de quelque rude boy de Trenchtown d’écouter cette chose, ça a du le faire rire sous ses dreadlocks. En clair, George Machin n’est pas Lee Perry et on s’en rend très vite compte. Ça mouline mécaniquement de la rythmique, mais les breaks, les aérations, les arrangements, il connaît pas vraiment …
Y’a pas que du dub, quand même. En gros, en faisant fonctionner mes puissantes capacités d’analyse au maximum, je dirais qu’on arrive à discerner plusieurs « orientations » dans ce Cd, comme s’il était construit comme les doubles 33T de l’époque (que ceux qui écoutent Nightmares On Machin n’ont pas connue). Un thème par face, en gros. Du dub au début donc (« Dreddoverboard », « Pipes honour », rien que les titres …). Ensuite quelques titres tirant sur le jazz-rock d’Herbie Hancock (« Groove Str. ») ou la techno préhistorique des 80’s (« Stars », un bon morceau).
Plus accessibles au commun des mortels l’enchaînement « (Man) The Journey » très latino,  « Bless my soul » (pour moi le meilleur titre du disque, rythmique pour une fois syncopée et chaloupée copyright Madchester, ambiance presque « rock ») laissent augurer d’un bon final, que vient de suite gâcher le funky mais trop surchargé « Cruise (Don’t stop) ». Ensuite curieusement jetés à la fin, un ramassis hétéroclite des morceaux les plus courts, un autre machin inutile dub, « Rise », une pochade rétro marrante (« Mission Venice ») qui ressemble à la musique de « The Party » de Blake Edwards ou à la B.O. d’un vieil OSS 117, et des percus africaines « Gambia via … », le genre de truc qu’on a déjà entendu des milliards de fois ailleurs …
Verdict impartial et indiscutable : élève Nightmares On Wax, vous avez quelques bonnes idées, mais vous manquez de concision. Et puis, fumer des pétards, ça fait pas sérieux, faut pas s’en vanter


YOUSSOU N'DOUR - IMMIGRES (1984)


Afrique adieu ...

Je sais pas si Youssou N’Dour s’est inspiré de la rengaine populacière de Sardou (ça m’étonnerait), mais ce « Immigrés » de 1984 est le premier de ses disques qui aura une résonance extra-africaine, et lui fera quitter son continent d’origine, faisant de lui une des premières stars de ce que l’on appellera « world music ».

Youssou N'Dour & le Super Etoile de Dakar - Concerts WOMAD 1989
Youssou N’Dour est très célèbre depuis tout gosse dans son Sénégal d’origine et un total inconnu partout ailleurs. Un concert à Paris pour la diaspora sénégalaise avec son groupe le Super Etoile de Dakar et quelques heureux concours de circonstances lui donneront les moyens d’enregistrer en France. Le résultat de ces sessions est un disque assez court (une grosse demi-heure) de quatre titres, qui lui permettra d’entamer une carrière internationale et de devenir un des chanteurs, sinon le chanteur africain le plus connu dans le monde.

Pourtant le succès de « Immigrés » est un accident heureux. La pochette (Youssou N’Dour en costume traditionnel) fait très « couleur locale », la langue choisie est le wolof et pas le français ou l’anglais, et aucune concession n’est faite au format radiophonique des titres (tous entre six et douze minutes). La musique elle-même ne cède pas aux sirènes du formatage des studios européens, et même si le son est first class et si on repère quelques synthés high tech, il s’agit bien de « musique africaine ».

Une musique que l’on devine festive, pleine de mélodies entraînantes et de riffs de cuivres qui la soutiennent et la soulignent, des tapis de percussions omniprésentes, des choristes, des instruments traditionnels africains, des synthés, des guitares. Une luxuriance sonore qui s’établit sans répit … Et par-dessus tout ça, la superbe voix couvrant une quantité peu commune d’octaves de Youssou N’Dour, fabuleux chanteur.

Tous les titres sont très rythmés, le tempo étant moins rapide sur « Pitche Mi », qui évoque par certains aspects les ballades anglo-saxonnes des années 60. « Immigrés » récoltera le succès habituel de Youssou N’Dour auprès de son public traditionnel sénégalais, mais fait nouveau, aura une certaine résonance bien au-delà de ce cadre. En France, Higelin le prendra en première partie, Et ailleurs des gens aussi connus que Paul Simon ou Peter Gabriel ne tariront pas d’éloges à son sujet, mettant des collaborations en place. Avec le temps, « Immigrés » sortira dans plusieurs pays européens pour finalement être distribué aux Etas-Unis en 1988, quatre ans après sa parution originelle. On est loin des schémas de rentabilité immédiate du music-business actuel.

Par son engagement « politique » au sens noble du terme, Youssou N’Dour deviendra une des figures de proue des artistes engagés dans les « bonnes causes », participant à des concerts pour la libération de Nelson Mandela, ou à une tournée Amnesty International, en compagnie de tous les centristes du rock (Gabriel, Sting, Springsteen, U2, Tracy Chapman, …). Les succès musicaux internationaux seront ensuite là, duo avec Neneh Cherry (le carton planétaire « 7 seconds »), composition de l’hymne de la Coupe du monde de foot 1998, … Parallèlement, il poursuit un engagement impliqué auprès d’organisations internationales.

DUSTY SPRINGFIELD - A GIRL CALLED DUSTY (1964)


Une certaine idée de la variété

Ce Cd est la réédition du 1er album de 1964 publié par l’Anglaise Dusty Springfield. Une Anglaise sous forte influence US, ainsi que le montrent les (nombreuses) reprises présentes : Dionne Warwick, Lee Dorsey, Supremes, …

Le résultat est excellent, une  soul teintée de rythm’n’blues, servie par une des meilleures (la meilleure ?) voix blanches de l’époque. Des arrangements et une production « grand public » ne doivent pas rebuter les puristes. Le tout donne certes dans la variété, mais de la variété de très grande classe. Tout le contraire des Nouvelles Stars, Star Ac et Cie.

Sa voix, les genres musicaux abordés font de Dusty Springfield une des grand-mères artistiques d’Amy Winehouse, autre chouchroutée anglaise.

A noter sur ce Cd une section bonus conséquente (8 titres) avec notamment le 1er single de Dusty (« I only want to be with you »), énorme succès en Angleterre, mais aussi en France par l’adaptation qu’en avait faite Richard Anthony (« A présent tu peux t’en aller »).


AMERICAN MUSIC CLUB - CALIFORNIA (1988)


Americana

Pas vraiment à l'aise devant les photographes, l'AMC...
Quand on parle des grands groupes américains méconnus de ces vingt dernières années, les amateurs du genre évoquent la larme à l’œil l’incompréhensible insuccès des Replacements de Paul Westerberg, des premiers Wilco de Jeff Tweedy (pour ces derniers, les années 2000 ont été florissantes)… Beaucoup plus rarement est cité le American Music Club de Mark Eitzel. Qui n’a rien à envier aux deux précédents et présente avec eux plusieurs points communs.

L’échec commercial des groupes puis de leur leader parti faire une carrière solo, mais surtout les paysages musicaux abordés, constituant un aboutissement parfait de tous les genres de musique populaire blanche des USA : country, folk, blues, rock and roll.

« California » est un chef-d’œuvre absolu où rien n’est à jeter. L’ambiance sombre, quelquefois sinistre renvoie au « Tonight’s the Night » de Neil Young, mais la pureté, la finesse et le classicisme des compositions en faisaient en cette fin des années 80 un sommet de ce que l’on n’appelait pas encore « americana ».

« Firefly », « Blue and grey shirt », « Western sky » sont stupéfiantes de perfection, le reste n’en est pas loin. Même les deux morceaux « décalés » du disque sont immenses : « Bad liquor » est un hallucinant brûlot punk de deux minutes et « Lonely » avec ses arpèges de guitare est le meilleur morceau que les R.E.M. ont oublié d’écrire à cette époque-là.


SIXTIES ARCHIVES - TEXAS PUNK FROM THE SIXTIES (1983)


La D2 ...

Ce « Texas Punk » (punk au sens 60’s du terme, pas des types à crête orange) fait partie d’une collection générique « Sixties Archives » déclinée en plusieurs volumes sous l’égide du label français Eva, disparu depuis …  Ce volume est donc « spécialisé » dans l’obscur tendance garage-bands en provenance du Texas dans la seconde moitié des 60’s. Le tout pour un résultat assez loin tout de même de la Rolls du genre garage, le coffret Nuggets, extrapolation du double 33T du même nom assemblé par Lenny Kaye … Assez loin aussi de nombreuses autres compilations (« Back from the grave », « Pebbles », …). Parce qu’à force de fouiner dans les poubelles de l’histoire musicale, on finit par y trouver des choses qui auraient autant gagnées à rester inconnues.
Drôles de zèbres : The Coastliners 1966
Cette compilation témoigne tout de même de la vitalité et de la multitude de groupes de cette « lost generation » américaine du milieu des années 60. Car après avoir inventé le rock’n’roll dans les 50’s, les Américains ont perdu la recette (qui peut citer un bon 33T de rock, accessoirement ’n’roll, digne de ce nom paru aux USA entre 58 et 65 ?). La pérennité du genre sera conservée et bonifiée en Angleterre (tout le British Blues Boom, les Beatles et le Merseybeat …), retraversera l’Atlantique (la British Invasion). Dès lors, une multitude de groupes inspirés ou laborieux copistes verront le jour, graveront le plus souvent quelques singles, au mieux quelque 33T pour les plus doués ou les plus malins …
Même le Texas, fief  des rednecks, n’a pas échappé au mouvement, et ce Cd présente 18 morceaux qui ma foi, valent bien un florilège des twists un peu balourds de, au hasard ( ? ), Springsteen … Au rayon imitateurs laborieux (non, je parle plus de Springsteen, quoique), on peut mettre les Reddlemen (like the Rolling Stones) , les Passions et les Circus (Pretty Things), les Castliners (un bon titre, le second trop calqué sur le Merseybeat). Kempy & the Guardians ont beaucoup écouté les Yardbirds … Quelques-uns font preuve d’originalité, les Y’all’s vont de l’avant avec leur titre mélangeant Beatles et guitares fuzz ; les Status Quo ne préfigurent pas le boogie monolithique de leurs homonymes mais plutôt Blue Cheer et Iron Butterfly avec leurs gros riffs fuzzy ; Him ressemble à un brouillon de Canned Heat avec son boogie primitif,  les Oedipus & The Mothers récoltent la palme du meilleur nom de groupe et du morceau le plus insignifiant du disque, les Pack sont les plus psychédéliques…
Quelques belles réussites, les Venetian Blinds avec un titre sauvage et sautillant à base de Farfisa tex-mex annoncent Sam the Sham ou Question Mark, les Pirates (sans Danny Logan) avec un bon morceau bluesy, les Continentals font brûler la gomme et ignorent royalement les British en se cantonnant à un excellent Diddley beat sur-accéléré. Et relégués fin de Cd, pour moi les meilleurs du lot, Danny & The Counts , avec notamment « Ode to the wind », qui derrière un intitulé un peu bébête, cache une merveille de ballade pop psychédélique …
Bon, évidemment tous ces gens ont eu une notoriété qui n’a pas dû dépasser le cadre de la famille et des amis, mais démontrent que le rock’n’roll, même au second plan, a toujours su rester vivant dans les mid-sixties aux USA…


SUPERGRASS - IN IT FOR THE MONEY (1997)


For your pleasure ...

Les Supergrass sont Anglais. Et comme tous les Anglais, un brin chauvins. Biberonnés au rock anglais, quand il s’est agi de faire de la musique, ils  ne sont pas allés chercher bien loin leurs sources d’inspiration … et juste de l’inspiration, pas une vulgaire copie de ce que d’autres avaient fait avant. Et tout ça avec une simplicité et une absence de prétention dont certains de leurs contemporains (qui a dit les frères Gallagher ?) auraient du avoir la bonne idée de s’inspirer. Supergrass, ce sont des types « normaux », des types honnêtes.

En rouge et noir ... Jeanne Mas ? Non, Supergrass 1997
Leur honnêteté, elle transparaît partout. Il n’y a pas de calculs chez Supergrass, pas de plan de carrière, la musique qu’ils font leur ressemble. Ils sont fans des grands groupes des années 60 (Beatles, Kinks, Who, Stones, Small Faces, les oubliés Zombies, …), du glam seventies et des guitares zeppeliniennes, des punks à références 60’s (Buzzcocks, Jam). Au détour d’une intro, d’une mélodie, d’un arrangement, de vocalises en harmonie, on retrouve chez Supergrass tous ces gens-là …

Avec un sens de la fête et de la bonne humeur qui n’appartient qu’à eux (le boogie mutant avec piano et cuivres de « Tonight », le très speed « Richard III » qui montre qu’il n’ont rien perdu de leur fougue initiale, …). Des grosses guitares à la Oasis, ils peuvent faire cela occasionnellement (« G Song »), mais passent vite à autre chose …Ce « In it for the money » qui n’est que leur second disque est déjà très mature, s’en va fureter vers la power pop (l’excellent « Sun hits the sky »), l’insouciance très Magical Mistery Tour (« Hollow little rain »), mais aussi vers des choses plus acoustiques souvent avec  bonheur (« Late in the day »), mais pas toujours (« It’s not me ») …

Cet entrain, les Supergrass sauront le communiquer dans des concerts où ils excellaient, géreront admirablement leur carrière à la manière des Jam (la dissolution du groupe interviendra donc avant qu’ils aient fait de mauvais disques) … « In it for the money » est un bon disque fait par des types bien, avec qui on aimerait traîner et boire des bières, très loin des stars lunatiques, hautaines et méprisantes que l’on voit trop souvent … Assez rare pour être souligné.




DR JOHN - THE VERY BEST OF DR JOHN (1995)


 Le groove de la Nouvelle Orleans

Gris-gris et Dr John
Malcolm John Rebennack, plus connu sous le pseudo de Dr John, est un artiste important, pianiste de son état (mais pas que), reconnu par ses pairs, mais négligé par le grand public, que ce soit ici ou aux USA. Pourtant les plus grands (Stones, Clapton, Clash, …) ont travaillé avec lui, s’en sont inspirés, ont repris ses morceaux.

Cette compilation offre un bon aperçu de la discographie (pléthorique) de Dr John. Sa musique, comme la ville de La Nouvelle Orleans à laquelle il est indéfectiblement attaché, est un immense melting pot où se côtoient blues, rock, funk, vaudou, jazz, et toutes les spécificités sonores locales. Ce qui donne ce groove chaloupé, moite, inimitable de Dr John. Qui rajoute par dessus les instruments le grognement mélodique qui lui tient lieu de voix.

Pour tous ceux qui ne connaissent pas, dépaysement sonore garanti.

Du même sur ce blog :
Gris-Gris
In The Right Place
Locked Down

VITALIC - OK COWBOY (2005)


Comme une compile techno ...


En France, on a jamais été très doués pour le rock. Pour tout un tas de raisons (musicalité de la langue, stratégies des grosses maisons de disques, « marché » franco-français, peu de public et d’endroits où jouer, …). Par contre, en matière de musiques électroniques, ça va mieux. De la grosse soupe (Guetta) à des gens reconnus mondialement (Daft Punk, Air, Garnier, …). Et tout un tas de types qui bidouillent leurs logiciels avec des résultats et une notoriété fluctuants …

Moby ? Phil Collins jeune ? Bah non, Vitalic ...
Vitalic (Pascal Arbez-Nicolas pour l’état-civil) est un de ceux-là. Un petit buzz avec ce « OK Cowboy », son premier disque en avait fait en son temps un « espoir » de la scène électronique française. Un Cd qui sans être génial (question essentielle : la techno, est-ce que ça peut être génial ?) avait fait un petit succès. On n’y trouve rien de révolutionnaire ou de visionnaire. Plutôt quasiment un tribute à des choses ou des gens qu’il a beaucoup écoutés. De la polka détournée du premier titre (mais John Lord dans les concerts de Deep Purple faisait déjà ça en 1970 …), au « La Rock 01 » très big beat – Chemical Brothers, en passant par le son Farfisa – garage 60’s (« Wooo »), les gros riffs de guitare metal à la Prodigy (« My friend Dario »), les rythmiques très Daft Punk (« Poney Pt 1 »), …

Et on pourrait continuer longtemps …

Tout ça n’est pas très original mais tous ces pastiches-imitations-hommages sont dans l’ « esprit », bien faits, et fonctionnent ce qui sauve globalement ce Cd.

Vitalic poursuit une carrière relativement méconnue du « grand public » mais bien fournie, tant au niveau de ses propres productions que de nombreux remixes, genre dans lequel il est assez recherché…


GERMS - (GI) (1979)


Apocalypse punk

Historiquement les Germs sont le premier groupe punk de Los Angeles. Et pas un des moins radicaux, dans une ville qui cultive la démesure en tous genres.

Darby Crash : Rock'n'roll suicide
Emmenés par le chanteur (?) Darby Crash et les riffs killers de Pat Smear, leurs prestations scéniques sont chaotiques, bien dans la tradition punk. Ce « (GI) » est leur premier disque (15 titres en 29 minutes plus un morceau live), produit par Joan Jett, l’ex guitariste des Runaways et responsable quelques mois plus tard de l’intergalactique succès « I love rock’n’roll ». Question production, Joan Jett n’est pas vraiment Phil Spector ou George Martin et ça s’entend. C’est violent, primaire, brut de décoffrage et approximatif. Mais c’est très bien ainsi, on ne risque pas de confondre les Germs avec Phil Collins ou Yes.

« (GI) » sera le seul disque « officiel » des Germs. Car les histoires punk finissent (vite et) mal en général. La fin de l’histoire, ce sera celle de Darby Crash. Qui pour attirer les médias, programme une overdose qui se révèlera fatale… Quelques heures plus tard, un certain John Lennon se fera assassiner en rentrant chez lui… Devinez qui a eu la une des journaux le lendemain…

Quant à Pat Smear, il sera des derniers mois de l’aventure Nirvana, avant que Cobain ne se fasse sauter le caisson.

« (GI) », malgré quelques bons titres, est pour moi un Cd à prendre plutôt comme un témoignage de l’existence d’un groupe jusqu’auboutiste que comme un classique du mouvement punk.


JEFFERSON AIRPLANE - THE BEST OF JEFFERSON AIRPLANE (2001)


Un géant de la musique américaine

L’Airplane a depuis longtemps disparu de la circulation et malheureusement s’efface peu à peu des mémoires. Contrairement au Grateful Dead, l’autre légende du psychédélisme américain (l’Airplane a eu une carrière moins longue, n’a pas compté un personnage aussi charismatique que Jerry Garcia dans ses rangs, …)

Et pourtant, il y a presque quarante ans, il était impensable d’imaginer qu’un festival puisse se tenir sans l’Airplane (du gentil Woodstock au sanglant Altamont), tant le groupe représentait toutes les aspirations d’une jeunesse américaine : la non-violence militante, la vie en communauté, la drogue et la musique qui va avec.

Jefferson Airplane : we can be together ?
Car musicalement dans les années 67-71 (qui constituent l’essentiel de cette compilation oubliant heureusement les avatars dispensables du Jefferson Starship et de Starship), l’Airplane était au top. Sa pop psychédélique et hallucinée était le parfait pendant du Floyd de Syd Barrett. Il suffit d’écouter les merveilles que sont « It’s no secret », « Volunteers », « Somebody to love » (la réponse sans équivoque au gentillet « I want to hold your hand » des Beatles), « White rabbit » (ou Alice sous LSD au Pays des Merveilles), …

Dans l’Airplane tout le monde composait, ce qui a donné des disques décousus et quelquefois disparates (et cette compilation n’y échappe pas), Marty Balin et Grace Slick se relayant ou se complétant le plus souvent au chant. Grace Slick était le personnage central du groupe. Sa technique vocale (abusant parfois du vibrato), sa beauté provocante (concerts topless en 1966 !!), ses relations « difficiles » avec les autres musiciens du groupe qui furent l’un après l’autre ses amants, l’Airplane s’organisait autour de sa diva sous acide.

Fer de lance de la culture musicale américaine de la seconde moitié des 60’s (le flower-power, le Summer of Love, la lutte pacifique contre la guerre au Vietnam), l’Airplane n’allait pas survivre artistiquement à la fin des utopies hippy quelques années plus tard.

Restent une poignée de disques majeurs dont cette compilation, témoignage d’une époque où les gens croyaient naïvement (déjà) que tout pouvait devenir possible.


GOLDEN AGE OF DOO WOP - THE GREAT PRETENDER (1995)


 Une compile parmi d'autres ...

Le doo- wop est un genre musical qui, cycliquement, revient au goût du jour. A l’origine fait par des noirs pour des noirs aux USA à la fin des années 50, il va voir son public s’élargir tant il se pose (involontairement) comme l’antithèse du rock’n’roll naissant : chansons minutieusement répétées, bons chanteurs, harmonies vocales impeccables, tenues de scène irréprochables …

Cette mode va générer une infinité de groupes, n’ayant souvent gravé que quelques morceaux, ce qui fournira une matière première inépuisable pour une multitude de compilations.

Celle-ci se situe bien dans la lignée générale (même si les puristes du genre ne comprendront pas forcément ce que certains artistes ou morceaux ici présents ont à voir avec le doo wop). 1/3 des titres sont des classiques incontournables, un autre tiers est constitué d’enregistrements plus obscurs, et un dernier tiers fait du remplissage, en fonction des contrats d’édition et des droits récupérés par les compilateurs.

Un Cd sympathique et plaisant, mais certainement pas la référence absolue du genre.


MIKE OLDFIELD - TUBULAR BELLS (1973)


Un génie, pas d'associé, et des cloches (tubulaires)

Les gens qui très jeunes (Oldfield n’a pas vingt ans quand paraît « Tubular Bells ») enregistrent seuls des disques sont peu nombreux, ceux dans le lot qui ont du succès (critique et commercial) se comptent sur les doigts d’une main (Stevie Wonder, McCartney, Prince, Todd Rundgren). Mais seul Oldfield a réussi le carton planétaire d’entrée.

Mike Oldfield : The Man Machine ?
Faire paraître un disque composé de deux longues suites instrumentales en 1973 pouvait sembler dans l’air (progressif) du temps. Mais que plus de trente cinq ans plus tard, ces deux titres soient encore écoutables avec plaisir montre la qualité de la chose. A des lieues des sottises progressives des Yes, Genesis, ELP et consorts, « Tubular Bells » avec ses climats changeants, tantôt apaisés et bucoliques puis violemment électriques et bruyants quelques mesures plus tard va engendrer toute une cohorte de suiveurs, plus souvent pour le pire (JM Jarre) que pour le meilleur.

Et pour que le conte de fées soit complet, c’est un copain d’Oldfield, qui va créer sa propre compagnie de disques pour distribuer une œuvre dont les autres labels ne voulaient pas. Les disques Virgin étaient nés et Richard Branson en route pour sa « carrière » de milliardaire hippy.

Oldfield, lui, ne se remettra jamais du succès de « Tubular Bells », dont un passage sera utilisé par Friedkin dans « L’Exorciste », et sa carrière déclinera entre tentatives de donner une suite du même niveau à son chef-d’œuvre, et tentations de hit-parades avec des morceaux pop quelquefois réussis, mais qui ne s’approcheront jamais de la beauté inégalée de « Tubular Bells ».


HAIRCUT ONE HUNDRED - PELICAN WEST (1982)


Le paraître et le néant ...

Des vrais rebelles, j'vous dis ...
Tout est dans l’apparence : bien coiffés, bien habillés (enfin, c’est ce qu’ils croient), bien propres sur eux. Haircut 100 accomplissent un exploit unique : sonner avec de vrais instruments aussi vide, aussi creux, aussi inexpressif que leurs collègues bardés de synthés de la vague électro-pop anglaise du début des années 80.

« Pelican West » ou quand les petits bourgeois british s’imaginaient faire de la musique, voire du rock.

Forcément, il doit bien encore se trouver quelque part des malentendants pour trouver ça bien, danser en remuant les coudes et les épaules sur « Nobody’s fool » et « Favourite shirts ». En 1982, quand cette chose est parue, le petit Nicolas et ses potes de Neuilly devaient adorer.


THE CULT - ELECTRIC (1987)


Furieusement électrique

Ian Astbury : chapeau pointu turlututu ...
Ce Cd est considéré comme le meilleur du Cult. Un groupe qui en 1987 revenait déjà de loin. Emmené par le chanteur Ian Astbury et le guitariste Billy Duffy, ayant tour à tour été post-punk, batcave, gothique, hippy, le groupe a vu en quelques années rétrécir son nom de Southern Death Cult en Death Cult pour finir en Cult.

« Electric » est un disque de hard-rock « à l’ancienne ». Guitares Led Zeppelin, riffs AC/DC, les glorieux ancêtres sont présents tout au long de ce Cd. A des lieues du hair metal américain et du cirque bruyant d’un Iron Maiden en Angleterre. Des morceaux courts, carrés, pêchus, très seventies, avec aux manettes Rick Rubin, producteur des Beastie Boys mais aussi des speed métalleux de Slayer.

Et reprendre « Born to be wild », l’hymne des Hell’s Angels de Steppenwolf montre que l’on a clairement choisi son camp : tous les potards à onze et roulez jeunesse.

Astbury et Duffy n’égaleront plus le coup de maître d’ « Electric », Astbury finira même par « remplacer » Jim Morrison lors d’une reformation douteuse d’une partie des survivants des Doors.


MC5 - HIGH TIME (1971)


Hard times

« High Time » du Five …
Difficile d’en parler sans évoquer les deux précédents. Qui pour le malheur de ce « High Time » avaient placé la barre très (trop ?) haut. Et tant qu’à évoquer « Kick out the Jams » et « Back in the USA », autant ne pas faire dans la demi-mesure.

« Kick out the Jams » est le plus grand disque live de tous les temps, « Back in the USA » le plus grand disque de pur rock’n’roll. C’est mon avis et je le partage.

Proxima Estacion Esperanza ?
Alors forcément quand à la fin de « Sister Ann » 1er titre de « High Time », déboule une section de cuivres , après des nappes de claviers et des chœurs féminins, on se pose des questions. Dont les réponses sont faciles à trouver dans le « way of life » du groupe. Perpétuellement défoncés, leur maître à penser ( ? ) John Sinclair en prison, ce sont cinq épaves qui entrent en studio, pour enregistrer dans le chaos, l’improvisation et « expérimenter ».

Mais autant être clair : le MC5 même en chute libre, ça déménage sévère. Parce qu’il y a une assise rythmique qui sans être géniale sait mettre la pression, parce que Rob Tyner est un grand chanteur, et aussi parce que sévit dans le Five la plus terrifiante paire de guitaristes à avoir relié des six-cordes à un ampli, les faux siamois (ils ne jouent jamais la même chose ensemble) Wayne Kramer et Fred « Sonic » Smith.

Alors sur « High Time », pas de terrorisme sonore à la « Kick out the Jams », pas de rock’n’roll roots à la « Back in the USA », mais plutôt des compositions très inspirées par la soul et le rythm’n’blues. Et malgré l’état de délabrement total du groupe, le résultat sonne sec, précis, tranchant. Sans jamais donner l’impression de bouillement sonique incandescent et incontrôlé, comme le faisaient leurs voisins de Detroit les Stooges à la même époque avec « Funhouse »

« Miss X » est la ballade plombée définitive qu’aucun groupe de hard ne sera capable d’égaler, « Over & Over » avec l’utilisation qui est faite des claviers pourrait sans problème figurer dans « Who’s next ». Et le reste est d’un bon niveau, même si au sein de quelques titres des digressions saugrenues vers du psychédélisme lourd (avec Iron Butterfly ou Blue Cheer comme points de repère) ne sont pas toujours très efficaces. Le tout emmené par des parties de guitare qui déchiquettent tout sur leur passage.

Avec ce dernier disque du Five et quelques mois plus tard le « Raw Power » des Stooges prendra vraiment fin une forme ultime de rock dangereux et violent.

 Ce sera le clap de fin de l’expression musicale la plus radicale, entamée par deux bandes de fous furieux, il y a une quarantaine d’années à Detroit, Michigan.

Depuis, ceux qui ont suivi ont toujours essayé de les copier. Sans y arriver.

Des mêmes sur ce blog :
Back In The USA

DUSTY SPRINGFIELD - DUSTY IN MEMPHIS (1969)


Un homme et une femme ...

La femme, c’est Dusty Springfield. La plus belle voix anglaise, quelque peu au creux de la vague en cette fin des 60’s après quelques années de gros succès populaires.

Encore un peu de choucroute ?
L’homme, c’est Ahmet Ertegun. Fondateur des disques Atlantic, qui a personnellement engagé Aretha Franklin, Wilson Pickett, Otis Redding et vient de signer Led Zeppelin. Le plus grand patron de maisons de disques que la musique ait connu. Avant tout un connaisseur et un fan de ses artistes. Rien à voir avec les sinistres comptables actuels dont le seul intérêt est de se faire de l’argent sur le dos du public ET des artistes.

En 1968, Ertegun offre à Dusty Springfield tout ce dont un chanteur pouvait rêver : un disque clé en mains, enregistré dans les studios de Memphis, avec les plus grands musiciens,  producteurs et compositeurs de soul. Lorsque Dusty est arrivée à Memphis, cette perfectionniste maladive aurait testé une centaine de titres ! Insatisfaite du résultat, elle abandonne le projet, avant de se raviser sous l’amicale pression d’Ertegun et de finaliser onze titres à New York qui sortiront sur le 33T original.

Le résultat est exceptionnel, les critiques dithyrambiques, et « Son of a preacher man » (que le malin Tarantino ira chercher pour le soundtrack de « Pulp Fiction ») choisi comme premier single fait une percée dans les charts … Et le public ne suit pas et « Dusty in Memphis » est un bide retentissant, qui va marquer le début de la fin pour sa carrière.

Il s’agit pourtant bel et bien d’un des quatre ou cinq plus grands disques de soul jamais gravés. Une œuvre totalement indispensable.

Réédité il y a quelques temps par Rhino avec la bagatelle de 14 titres bonus. Tous également d’une qualité sidérante, tant artistique que sonore.


CLAP YOUR HANDS SAY YEAH - CLAP YOUR HANDS SAY YEAH (2006)


On peut tout de même applaudir

Heureusement qu'ils étaient pas dix, comment se seraient-ils appelés ?
Le 1er titre a l’air plus ou moins repiqué sur le « Clap hands » de Tom Waits. Ceux qui suivent sont soit décalqués sur « Don’t worry about the government » et « Psycho Killer » (Talking Heads 77) pour les morceaux sautillants, soit sur « Pale blue eyes » (Velvet Underground ) et « Happy when it rains » (Jesus & Mary Chain), pour les titres lents.

Rien de bien original en soi, mais on peut trouver nettement pire comme influences. Les Clap Your Hands Say Yeah avec ce postulat de départ un peu léger, ont cependant eu la bonne idée de ne pas en rajouter (le Cd dure moins de 40 minutes et évite l’écueil du rabâchage) et sont devenus en 2006 avec ce disque la sensation New-Yorkaise branchée du moment.

Un groupe immédiatement identifiable grâce à la voix de son chanteur, aussi insupportable à la longue que celle de Roger Hogdson des feu (du moins j’espère) Supertramp.

Certainement pas la trouvaille du siècle, mais une imitation très réussie de groupes que j’apprécie. En ce qui me concerne, et par les temps de médiocrité musicale qui courent, pourquoi pas ?


TODD RUNDGREN - SOMETHING / ANYTHING (1972)


Tout seul ... comme un grand

Depuis le temps, on l’a quelque peu oublié, Rundgren, même s’il compte encore des bataillons de fans fidèles. Mais au début des seventies, il avait fait fort, avec ce disque et son suivant (« A wizard, a true star »), souvent considérés comme les pièces maîtresses d’une discographie hétéroclite et longue comme un jour de trader sans plus-values.

Justement, Rundgren se traîne une sale réputation de type près de ses sous, plus prompt à parler pognon et bizness que musique, distant et arrogant, ce qui lui vaut une certaine forme d’ostracisme de la part des médias spécialisés, peu séduits par le bonhomme. Un peu comme Prince, qui l’a souvent cité, et partage avec lui certains traits de caractère désagréables …

Todd Rundgren 1973
Rundgren a débuté avec Nazz, groupe quelque peu anecdotique de rock garage, réhabilité avec d’autres par Lenny Kaye sur sa compilation « Nuggets », avant de démarrer une carrière en solo au début des années 70. Ce « Something / Anything » est une œuvre considérable. A l’origine double 33 T plus ou moins conceptuel (chaque face vinyle est censée représenter un thème), à la durée démesurée (une heure et demie), c’est aussi pour l’essentiel (les trois premières faces) un disque où tout est écrit, joué, arrangé et produit par le seul Rundgren. Qui rejoint pour l’occasion des gens comme Stevie Wonder ou Paul McCartney, adeptes de ce genre d’exercice solitaire.

Il faut être fan au dernier degré pour prétendre que tout est bon dans ce pavé. Qui souffre de tous les défauts inhérents à ce genre de mausolées égocentriques, l’auto complaisance qui empêche de trier le superflu de l’essentiel, et les lacunes techniques pour certains instruments qui finissent par devenir trop voyantes (ici les parties de batterie, réduites à leur plus simpliste expression). Mais la balance est largement favorable, et Rundgren se révèle un auteur inspiré et un musicien doué (avec notamment de superbes parties de guitare sur la première face du second disque). Et personnellement, je n’échangerais pas ce « Something / Anything » contre les deux premiers McCartney. Un McCartney dont l’influence et l’ombre mélodique planent sur pas mal de titres, à commencer par le hit introductif « I saw the light », mais également des choses comme « Saving grace », « Marlene », « Cold morning light »,… Et comme le Paulo de Liverpool, Rundgren sombre quelquefois dans la mièvrerie (« It wouldn’t have … » comme du Chicago de la fin des 70’s).

Il y a aussi de la ballade à tendance soul classico-pompière qui ravira les amateurs de Procol Harum, « Sweeter memories », « Torch song », « Dust in the wind », cette dernière n’ayant que le titre de commun avec la scie sirupeuse de Kansas, … quelque titre qu’on croirait sorti d’un bastringue rétro (« The night the carousel … »), un hommage au rythm’n’blues de la fin des 50’s (« Wolfman Jack », référence au légendaire DJ blanc dont Lucas fera un des personnages centraux de son « American graffiti » l’année suivante), un hommage également (enfin rien qu’au titre je suppose) à Hendrix (« Litle red lights ») sur lequel le Todd se multiplie à la guitare. Car Rundgren, souvent présenté à tort comme un musicien « à machines » est un excellent guitariste, qui n’hésite pas à envoyer le bois grave sur le hard blues « Black Maria », sortir bien avant l’invention du terme des titres de power pop (« Couldn’t I just tell you »), et attendre quasiment la fin du disque pour placer son titre le plus connu, la somptueuse ballade « Hello it’s me ».
Alors certes sur cette somme il y a parfois l’impression de redites et une poignée de titres guère marquants, mais on aimerait trouver autant de qualité d’écriture chez les prétendus génies actuels (au hasard, le quelconque Sufjan Stevens) qu’il y en a sur ce disque.

Assez étrangement, « Something / Anything », disque pourtant très « anglais » par bien des aspects, sera un best seller à peu près sans lendemain aux Etats-Unis seulement.



EVERYTHING BUT THE GIRL - EDEN (1984)


Jardin cool

EBTG 1984
Premier Cd du duo Tracey Thorn – Ben Watt, « Eden » a tranché lors de sa parution (1984) dans le paysage de la pop anglaise, dominée par les rengaines électroniques péraves de Depeche Mode et autres Orchestral Manœuvres in the Dark et Duran Duran.

Doté ( ?) d’un physique plutôt ingrat, le couple Thorn – Watt ne pouvait jouer sur son image et n’avait lui, que sa musique à mettre en avant. Ce Cd d’une élégance rare et raffinée de tout juste une grosse demi-heure, nous entraîne dans une ambiance jazzy et bossa-nova portée par la voix au timbre voilé de Tracey Thorn, une des  meilleures chanteuses (avec Liza Frazer des Cocteau Twins) de la new-wave anglaise (qui s’est malheureusement trop souvent dispersée dans de nombreuses collaborations pas toujours judicieuses, amenant beaucoup et retirant peu).

Aux manettes, on retrouve Robin Millar, metteur en sons d’une scène cool et jazzy (notamment la réfrigérante Sade), spécialiste de ce son « boisé » qui enrobe les morceaux.

Fond sonore idéal pour des cocktails, « Eden » est à consommer en toute circonstance sans modération.

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THE SONICS - HERE ARE THE SONICS !!! (1965)


Les Sonics, ta mère elle va adorer ...
Les Sonics, c’est LE groupe ultime. Garage préciseront les pointilleux. Au diable les pointilleux !
Les Sonics ont poussé les curseurs tellement loin dès le paléolithique supérieur (1965 pour être précis) que depuis personne n’a fait aussi fort, aussi bien. Et surtout pas mieux.
Les Sonics sont Américains (Tacoma, à trois larsens de Seattle), traînent leurs guêtres d’ados dans un paysage musical tchernobylisé. Oh certes on trouve à cette époque-là plein de choses aux States, du folk, de la pop, de la soul, du blues, … presque tout ce qu’on veut en fait. Sauf du rock’n’roll. Et le rock’n’roll, c’est juste ce que les gars des Sonics aiment par-dessus tout. Pour ça, il faut écouter ce qui vient d’Angleterre, les Stones, Kinks, Who, Animals, Pretty Things, … et s’en inspirer.
Les Sonics dans la brume électrique
Les Sonics vont se trouver d’entrée confrontés à un petit problème : aucun des cinq ne sait vraiment jouer d’un instrument ou chanter. Qu’à cela ne tienne, ils vont faire de ces tares a priori rédhibitoires leur principale qualité. Utilisant les plus grosses ficelles pour masquer leurs énormes lacunes. Tout est enregistré à un volume déraisonnable, tous les potards à onze, tous dans le rouge. Le résultat est une bouillie sonore de laquelle surnagent de gros accords saturés plein de fuzz, quelques riffs d’un sax corne de brume, quelques notes de claviers martelés. Quant au chanteur, un fou furieux nommé Gerry Roslie, il préfère vociférer à la place de chanter. Comme son modèle c’est Little Richard, en dépit de tout bon sens, il va parsemer absolument tous ses titres (souvent dès l’intro, allez savoir pourquoi) de hurlements à faire passer ceux de Alan Vega sur « Frankie teardrop » pour des vagissements de prématuré.
Oubliez le punk, le hardcore, les bruitistes divers, les Stooges, le MC5, les Cramps, les garagistes japonais ou scandinaves, les guignols du death metal, tout ce que vous voulez d’extrémiste et d’agressif au niveau sonore, la référence, la mètre-étalon auquel tous ces gens-là (les plus honnêtes d’entre eux l’ont d’ailleurs reconnu) ont voulu se mesurer, c’est le premier (et seul intéressant) disque des Sonics, ce « Here are the Sonics !!! ».
Qui commence par un monstrueux « The Witch », tout petit succès local, honteusement ignoré par Lenny Kaye sur sa compile Nuggets, et à l’origine face B de leur premier 45T, une reprise du « Keep a knockin’ » de Little Richard. Un titre qu’on ne sait trop comment, ils ont réussi à écrire. Pas très compliqué, plutôt du genre très efficace, classique toutes catégories instantané. Comme leurs trois autres compos personnelles (sur les seize de la réédition Cd, soit les douze du vinyle original plus quatre bonus), « Boss Hoss », « Strychnine » et « Psycho », d’une simplicité et d’une évidence absolues.
Le reste, des reprises nucléaires. Des pionniers du rock’n’roll (« Roll over Beethoven » de Chuck Berry, « Good Golly Miss Molly » de Little Richard), des standards Motown (« Do you love me » des Contours, « Money » de Barrett Strong), de classiques soul (« Night time is the right time » de Ray Charles) ou rhythm’n’blues (« Walking the dog » de Rufus Thomas), … Le tout descendu à toute blinde, à grand coups de riffs bêtas et de hurlements sauvages, dans un chaos sonore total…
Ce genre de musique qui foisonnera dans tous les garages américains de la seconde moitié des 60’s, accordera à quelques-uns (Remains, Seeds, Standells, Mitch Ryder, 13th Floor Elevators, …) une certaine reconnaissance populaire et de petits succès. Rien de tout cela pour les Sonics, au management particulièrement indigent. De toutes façons, le groupe avait a peu près tout donné avec ce premier disque, une paire sans intérêt suivront, avant la débandade et une reformation à un âge canonique au début des années 2000 passée à peu près inaperçue.
Preuve ultime que les Sonics étaient quand même de furieux cinglés, les trois derniers titres du Cd correspondent à un single de Noël. Et quel single ! « Don’t believe in Christmas », (rien que le titre ! ), est une variation sur le « Too much monkey business » de Chuck Berry, ces choses-là ne peuvent pas sortir d’un esprit sain. « Santa Claus » n’est autre qu’une reprise de « Louie Louie » avec paroles aberrantes. Et mort-aux-rats sur le cake à la strychnine, la seule chanson de Noël du lot, une reprise de « Jingle bells », ils l’ont appelée … « The village idiot ».
Rock’n’roll suicide …
Et dans ce genre-là, inutile de chercher mieux, vous trouverez pas …



EVERLY BROTHERS - THE DEFINITIVE EVERLY BROTHERS (2000)


La chance aux chansons

Ils passaient à la télé et à la radio quand ils n’étaient que deux gamins chantant, au début des années 50 … bien avant les déhanchements d’Elvis le Pelvis. Et donc, comme ils se plaisaient à le faire remarquer lors de leur fabuleux « Reunion concert » de 1983, le rock’n’roll, ouais, c’est bien joli, mais eux ils étaient déjà là avant …

Même si leurs premiers succès ne datent réellement que de la fin des années 50, et même si tout n’a vraiment commencé qu’avec « Bye bye love » en 1957. Un titre comme une marque de fabrique, un thème gentillet, une mélodie immédiatement mémorisable, et Don et Phil Everly qui chantent… d’une façon unique, instantanément reconnaissable. Toujours à l’unisson, et pas seulement sur les refrains, sur tout le titre … Pas une nouveauté, des duos, voire des groupes chantant, la country music (et son public) en était particulièrement friande, de toutes ces voix de tête à fort accent campagnard et redneck vocalisant de concert.

Everly Bros fin 50's
Les Everly eux ont une diction parfaite et délaisseront très vite la stricte country de leurs débuts pour s’orienter vers une variété haut de gamme. Leur synchronisme vocal parfait, à une époque ou le re-recording n’existait pas et encore moins Auto-Tune, l’évidence des mélodies et les arrangements somme toute très grand-public, très centristes des morceaux, vont les installer pendant presque dix ans au sommet des hit-parades américains.

Comme beaucoup à cette époque-là, ils pourront s’appuyer sur les morceaux clés en main fournis par un jeune couple d’auteurs-compositeurs Felice et Boudleaux Bryant, qui leur écriront l’essentiel de leurs créations. Et comme tout le monde, les Everly Brothers constelleront leur répertoire de reprises choisies de Little Richard, Buddy Holly, Roy Orbison, … Ils reprendront même le « Je t’appartiens » de Gilbert Bécaud (oui oui, on  parle bien du même, du type en costard noir et Adidas blanches ( ! ) des shows de Maritie et Gilbert Carpentier) qui adapté en « Let it be me » sera un de leurs plus gros succès. Les Everly ne se cantonneront jamais aux romances adolescentes pour lesquelles ils étaient à peu près sans équivalents, ils n’auront pas peur, à l’inverse de stars centristes reconnues (Sinatra, Warwick, …), de se frotter à du rockabilly (« Wake up Little Suzie »), voire du rock’n’roll tout ce qu’il y a de plus roots (« Bird dog », « Claudette », « Lucille », …).

Everly Bros - Reunion Concert Septembre 1983
Le premier des deux Cds de cette compilation (50 titres en tout) est le meilleur. De 1957 à 1961, les Everly Brothers ont aligné avec une régularité de métronome des titres colossaux, de la lente ballade countrysante « Maybe tomorrow » à l’angélique « Take a message to Mary », en passant par la très pop « Cathy’s clown » (devenue « Le p’tit clown de ton cœur » une fois reprise par Hallyday), l’himalayenne « Walk right back » qui n’a rien à envier aux productions Motown ou Spector, la pièce montée baroque « Temptation ». Mention particulière à « All I have to do is dream », tout simplement une des plus belles chansons du monde …

Le second Cd, jusqu’aux disputes qui entraîneront la « séparation » des deux frangins au milieu des seventies,  est un ton en dessous. Même s’il débute par « Crying in the rain », qui donne vraiment envie de chialer tellement c’est beau, et qu’il pleuve ou pas … Insensiblement et insidieusement, la qualité intrinsèque des titres décline, au profit d’arrangements de plus en plus fignolés et tarabiscotés, qui voit les Everly se livrer à des choses vocalement ahurissantes et insensées. Laissant de côté les mélodies simples et chansons évidentes. Le succès s’en ressentira, peu de titres iront tutoyer le haut des charts, et l’enlevée « The price of love » sera en 1965 leur dernier grand hit.

Les dernières années du duo paraissent quelque peu désuètes, qui les voit s’entêter sur la recette qui a fait leur fortune, avec des orchestrations de plus en plus sirupeuses. Cette compilation se conclut par « On the wings of a nightingale » de leur excellent album de come-back  « EB 84 ». Ce titre est signé d’un de leurs illustres fans, Paul McCartney, c’est un de ses meilleurs morceaux à lui des quarante dernières années, et servi par les voix intactes des frangins, ça le fait …

Ce qui amène à dire quelques mots sur l’influence que Don et Phil Everly ont eu sur le milieu musical. Assez impressionnante, il faut bien dire. Des gens comme les Beatles ou les Beach Boys ont commencé à répéter leurs propres harmonies vocales en prenant comme modèle les Everly, Simon et Garfunkel en particulier leur doivent absolument tout, et d’une façon générale tous les duos chantants se sont inspirés de leur travail (Sonny & Cher, Carpenters, Righteous Brothers, Starsky & Hutch, Stone et Charden, …).

A noter que leur live de « reformation » (« Reunion concert ») est un colossal tour de chant, certaines de leurs chansons se voyant transcendées par le live (et aussi un super backing band) …

Enfin rayon people, Erin Everly, fille de Don Everly et groupie notoire du L.A. des années 80, a été l’espace de quelques jours ( ! ) mariée à l’intergalactique crétin Axl Rose …

Des mêmes sur ce blog :
EB 84